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La France championne du monde : «Je peux mourir tranquille, maintenant»

Par : Vincent Mongaillard

La fan-zone de Paris a exulté à chaque but français, ce dimanche, en finale de la Coupe du monde. Jusqu’au coup de sifflet de final.

En ce dimanche divinement beau, Julio, 26 ans, s’est montré devin. Avant même le coup d’envoi, cet étudiant en littérature à la Sorbonne brandissait son carton fait maison « Champion du monde » peinte de deux étoiles dorées. Alors au coup de sifflet final, cet éternel optimiste savoure son pronostic. La France vient de l’emporter 4-2 face à la Croatie et devient championne du monde. « C’est le plus beau cadeau que Didier Deschamps pouvait nous faire. Il a réussi son pari. Je me sens apaisé, je peux mourir tranquille », sourit celui qui a, pourtant, toute la vie devant lui.

Comme Julio, ils sont quelque 100 000 hommes, femmes, enfants ivres de bonheur, mais serrés comme des sardines dans la fan-zone du Champ-de-Mars à Paris (VIIe). Plus un centimètre carré d’herbe piétinée pour reprendre son souffle. Qu’importe, ils ont tous des réserves d’énergie pour pleurer ou scander sans compter « Qui ne saute pas n’est pas Français ! »

Jusqu’à l’ultime seconde, ces supporteurs prêts à souffrir ont tremblé et transpiré devant les 4 écrans géants dont le plus imposant offre la superficie d’un F5 de 103 m2.

Fumigènes et pétards

À chaque fois que les Tricolores marquent, ce sont les soldats du feu, euphoriques, qui réagissent les premiers, dégainant leur lance à incendie pour rafraîchir d’eau miraculeuse des foules assoiffées. « Merci les pompiers, merci les pompiers ! » remercient-elles avant de poursuivre par des « Merci les Bleus ! » Les fumigènes et les pétards, bien qu’interdits, sont aussi de la fête. Au quatrième but, des gendarmes en tenue de Robocop se congratulent, sans se cacher, avant d’être rappelés à l’ordre par leur chef qui ne rigole pas

Éric, magasinier qui célèbre ce dimanche son 56e anniversaire, est sur un petit nuage. « Mon plus beau cadeau, aujourd’hui, c’est ma femme. Et juste après, c’est cette deuxième étoile. Cette date du 15 juillet 2018, je ne pourrai jamais l’oublier », s’enthousiasme-t-il.

Al Raly, 22 ans, étudiant en management, marchait à peine en 1998. Deux décennies plus tard, il court vers le bonheur. « Je suis heureux d’être français. Même à l’étranger, ce sera une fierté », assure ce globe-trotteur. « Et je pourrai dire à mes enfants : le 15 juillet 2018, j’étais face à la Tour Eiffel pour assister au couronnement de Pogba et de Grizou. Je leur montrerai toutes mes photos souvenirs », se projette-t-il.

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Ambiance sur le Champ-de-Mars, en face de la Tour Eiffel./LP/Olivier Corsan

Denise, 70 ans, se plonge, elle, dans ses souvenirs. « Je me revois en 1998, je rajeunis de 20 ans aux côtés de toute cette jeunesse. Je suis contente pour elle car elle a souvent vécu des événements traumatiques comme les attentats ces dernières années », explique-t-elle. « C’est beau de tous se retrouver dans des moments de partage », jubile sa fille Sandra, 40 ans, fonctionnaire à la « Sécu ».

Une Marseillaise qui porte

L’assistance est tricolore à l’image de ces couronnes de fleurs, de cette longue barbe teinte pour l’occasion, de ces drôles de crêtes-de-coq sur le crâne, de ce chapeau melon, de ces mains gonflables, de ces confettis. Et évidemment de ces tonnes de drapeaux qui s’agitent et accompagnent ici ou là un étendard breton ou algérien. Les tuniques bleues à l’effigie de Mbappé comme les marinières sont les tubes vestimentaires de l’été.

Soyen, 11 ans, exulte. Sa mère, Ilhem, encore plus. « Mon fils a arrêté le foot. En voyant tout ça, il va avoir envie de reprendre. Un jour, il m’avait dit : Je veux être footballeur professionnel pour pouvoir t’acheter une maison et une voiture », raconte la mère de famille âgée de 48 ans. Le clapping à la sauce hexagonale a de quoi rendre jaloux ses inventeurs islandais.

Les « Marseillaise » à répétition s’entendent jusqu’à Zagreb, surtout quand les forces de l’ordre se mettent, elles aussi, à donner de la voix. Alexandre, 20 ans, étudiant en BTS, est aux premières loges, collé contre la barrière. « Le foot, c’est toute ma vie. Cette victoire, cela change tout, cela nous fait entrer dans une autre dimension », commente-t-il.

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Près de 100000 personnes s’étaient réunies sur la fan-zone./LP/Olivier Corsan

« C’est ma première étoile. Parce que le 12 juillet 1998, j’étais dans le ventre de ma mère », enchaîne ce garçon de Créteil (Val-de-Marne) qui a vu le jour un mois après le sacre de Zizou.

Arrivé dès 10 heures pour être certain d’avoir une bonne place, Jabril, 21 ans, étudiant, ne regrette pas le déplacement. « Le brassage au sein de cette équipe de France avec des joueurs qui nous ressemblent, c’est aussi la force tout un pays. Il n’y a plus de noirs, d’Arabes, de Chinois, de Vietnamiens…, on est tous Français, on grandit tous ensemble », applaudit-il. Ce rêve pour l’éternité lui fait même oublier ses tracas quotidiens. « Je cherchais un job d’été, je n’ai pas trouvé alors cette deuxième étoile, ça me console largement », apprécie-t-il.

Vincent Mongaillard

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