Brazzaville : Déclaration du Collectif des partis de l’opposition Congolaise

« Sur la question de changement de Constitution, le pouvoir est coincé. Il doit choisir entre respecter la Constitution et laisser le Congo en paix, ou passer en force, provoquer les troubles et connaître au mieux le sort de Compaoré si ce n’est pas celui des Kadhafi. Il n’y a pas d’autres issues et ceux qui l’encouragent dans cette voie, doivent dès à présent savoir qu’ils seront comptables des conséquences qui adviendront. »

Collectif des partis de l’opposition Congolaise

Conférence de presse

Brazzaville 07 août 2015


Propos liminaire

Mesdames et messieurs les journalistes,

Du 26 au 29 juillet 2015, s’est tenu à Brazzaville un évènement inédit dans les annales politiques de notre pays, à savoir : le Dialogue National Alternatif des Forces Politiques et Sociales opposées au changement de la Constitution du 20 janvier 2015. Une semaine après la tenue de ce vrai dialogue national qui, contrairement au soliloque de Sibiti, a connu la participation des partis de l’opposition congolaise, des partis de la majorité présidentielle y compris des membres du gouvernement, des plateformes et/ou mouvements citoyens, des représentants de la diaspora et des individualités, le Collectif des Partis de l’Opposition Congolaise a souhaité avoir un partage avec la presse nationale et internationale sur les retombées de cet évènement qui marquera, à n’en point douter, de manière indélébile l’histoire politique de notre pays.

Le Collectif vous remercie donc d’avoir répondu à son appel pour la présente conférence de presse qui portera sur deux points :

· les conclusions du dialogue alternatif ;

· la gouvernance chaotique du pays.

1. Des conclusions du Dialogue National Alternatif

Le Dialogue National des Forces Politiques et Sociales opposées au changement de la Constitution du 20 janvier 2002 a été voulu « alternatif » parce qu’organisé en contradiction à la mascarade de dialogue tenu à Sibiti, du 13 au 17 juillet 2015, sanctionné par un échec cuisant.

En effet, le vrai dialogue national inclusif, ce dialogue auquel l’opposition congolaise réelle a appelé depuis 2012 à travers l’appel à la tenue des Etats Généraux de la Nation, a été détourné par le pouvoir en place qui, à Sibiti, l’a réduit en un simple espace additionnel dans le processus de la campagne pour le changement de la Constitution du 20 janvier 2002. Tous les objectifs que la classe politique était en droit d’en attendre, n’ont pas été atteints par manque de consensus, d’une part, en raison de l’absence de l’opposition réelle audit dialogue et, d’autre part, du fait de la division des participants en trois tendances :

· une première, partisane de l’évolution des institutions par le changement de Constitution ;

· une deuxième ayant porté sur l’évolution des institutions par la révision ;

· et, une troisième, sur le maintien de l’actuelle Constitution.

Collectif des partis de l’opposition Congolaise, signataires de la déclaration du 17 août sur les élections législatives de 2012

1.1. Sibiti : Confirmation du dispositif électoral frauduleux

La gouvernance électorale a été comme abordée du bout des lèvres, sans réflexion novatrice, pour être une simplement répétition de la littérature d’Ewo 2011 et de Dolisie 2013 dont les recommandations n’ont jamais connu d’application.

En effet, les participants au monologue de Sibiti n’ont pas défini les nouvelles règles touchant aux questions nodales d’une bonne gouvernance électorale, s’étant contentés d’énoncer, comme précédemment, des vagues généralités sur la CONEL, la révision des listes électorales, le découpage électoral, la biométrie, le bulletin unique, le manque de rigueur dans l’application des textes en vigueur, l’influence nocive qu’exerce sur l’administration électorale sa hiérarchie, le financement des campagnes électorales, l’implication des médias.

Tout le monde le sait, la gouvernance électorale demeure préoccupante malgré les propositions constructives des partis de l’opposition et les recommandations des observateurs nationaux et internationaux à l’issue des missions d’observation et d’évaluation de l’Union Africaine aux élections législatives d’août 2007 et de novembre – décembre 2013, des observations de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) en 2013, et de l’atelier de Brazzaville, organisé en décembre 2012, par le gouvernement congolais en partenariat avec le PNUD, l’USAID, la France et l’Union Européenne. Cette gouvernance présente les caractéristiques ci-après :

1. l’absence d’une commission électorale nationale, réellement indépendante, chargée de gérer le processus électoral de l’amont à l’aval. Nul n’ignore en effet que la CONEL actuelle n’assure que le suivi des actes préparatoires posés par le ministère de l’intérieur et de la décentralisation ;

2. un fichier électoral vicié et des listes des électeurs truquées, constituées dans un flou artistique malgré les multiples révisions des listes électorales réalisées dans notre pays et le recensement administratif spécial réalisé en 2013, en vue des élections locales de 2014. Pour illustrer la malice du pouvoir et son refus d’améliorer la gouvernance électorale, il sied de rappeler ici que, pour la seule élection présidentielle de 2009, le pouvoir avait proclamé cinq fichiers électoraux : un premier corps électoral arrêté à 2.279.144 électeurs selon le fichier de 2008 ; un second corps électoral proclamé par le président de la CONEL, évaluant le nombre des électeurs à 1.800.000 ; un troisième corps électoral arrêté à 2.078.802 électeurs et présenté par le ministre en charge des élections à la proclamation des résultats ; un quatrième arrêté à 2.000.120 électeurs (chiffre communiqué alors au corps diplomatique) et un cinquième fichier qui estimait le corps électoral à 2.228.000 électeurs. Cette instabilité du nombre des électeurs est une preuve palpable de la manipulation du corps électoral par le pouvoir à des fins de tricherie.

S’agissant toujours du fichier électoral, il est important de rappeler que la concertation de Dolisie (2013) avait estimé inefficient de procéder à sa reconstitution par voie de révision des listes électorales et avait recommandé l’organisation d’un recensement administratif spécial. Tout le monde sait que c’est suite à la farouche volonté de tricher du pouvoir que ce recensement avait été un fiasco. En effet, ce recensement a donné lieu à une magique majoration du nombre d’électeurs dans les zones favorables au Parti Congolais du Travail et à une minoration des électeurs dans les zones estimées acquises aux partis de l’opposition.

Cependant, il est difficile de comprendre que le dialogue de Sibiti ait opéré deux pas en arrière en reconduisant la pratique incongrue de la révision des listes électorales pour organiser les prochaines élections, de surcroit sur la base du dernier recensement administratif spécial (2013) dont les résultats ont été reconnus par tous comme catastrophiques.

Que ne dirait-on pas de l’attribution des cartes nationales d’identité et des cartes d’électeurs à des étrangers dont, notamment les Congolais de la RDC, les Rwandais, les Burundais, les Tchadiens, les Centrafricains, les Angolais, les Gabonais, les Ouest Africains, etc. !

3. des entraves à la libre circulation de tous les acteurs politiques sur toute l’étendue du territoire national et du libre exercice des activités des partis politiques, ce, en violation des dispositions constitutionnelles relatives aux libertés et droits fondamentaux dont, notamment les articles 19 et 21 qui stipulent :

· article 21: « l’Etat reconnait et garantit, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d’aller et de venir, d’association, de réunion, de cortège et de manifestation. ».

· article 19 : « Tout citoyen a le droit d’exprimer et de diffuser librement son opinion par la parole, l’écrit, l’image ou tout autre moyen de communication. La liberté de l’information et de la communication est garantie. La censure est prohibée » ;

4. un financement sélectif et arbitraire de la vie politique et des campagnes électorales en violation de l’article 26 de la loi sur les partis politiques qui stipule : « les partis ou groupements politiques ont droit à un financement de l’Etat. La subvention allouée aux partis ou aux groupements politiques est inscrite chaque année au budget de l’Etat ». En effet, la vie et le fonctionnement du PCT et toutes les campagnes électorales de ses candidats en particulier et de ceux de la majorité présidentielle en général font étalage des sommes astronomiques tirées des caisses de l’Etat pour financer leur organisation. Les élections sont transformées en enchères publiques et l’achat du vote est devenu la pratique quotidienne et sans vergogne du pouvoir, annihilant le peu de crédit accordé au processus démocratique dans le pays ;

5. l’inégal accès de toutes les sensibilités politiques aux médias publics et l’inégalité de traitement dans la couverture médiatique des campagnes électorales, l’opposition ne bénéficiant pas d’un traitement dans les médias publics égal à celui réservé aux partis de la majorité présidentielle, sous l’oeil complice du Conseil supérieur de la liberté de communication, l’organe prétendument régulateur de ladite liberté ;

6. le manque de neutralité de l’administration électorale constituée totalement d’agents d’appartenance avérée au PCT et/ou aux partis et associations de la mouvance présidentielle, soutenant tous le candidat Denis Sassou Nguesso et ses partisans ;

7. le manque de neutralité de la force publique commise à la sécurisation des élections, du fait de la présence péremptoire des éléments des milices privées et des polices parallèles du pouvoir, complices d’exactions des candidats de la mouvance présidentielle ;

8. la faible présence des militants de l’opposition dite modérée, dépourvus de tout pouvoir dans la gestion du processus électoral.

Comme on le voit, le pouvoir en place ne veut pas retoucher un système électoral qui, depuis 2001, était conçu pour transformer la victoire militaire de 1997 en une victoire pérenne et définitive afin de transformer le Congo en une monarchie absolue où devraient régner de manière successive les membres du clan de Sassou. Et, c’est ce système qu’il entend imposer à la classe politique pour son référendum constitutionnel dont, une fois de plus, les résultats sont connus à l’avance.

1.2. Des conclusions du dialogue national alternatif sur la question électorale

Prenant toute la mesure de l’urgente nécessité de refonder en profondeur le système électoral frauduleux à l’œuvre depuis 2001 et partant des expériences positives passées en la matière, le Dialogue National Alternatif a adopté plusieurs recommandations, de nature à concourir au renouveau attendu pour une élection présidentielle libre et crédible en 2016 en particulier. Il s’agit de :

1. l’élaboration et l’adoption d’une nouvelle loi électorale impartiale et impersonnelle ;

2. la réalisation d’accord-parties, d’un vrai recensement administratif spécial ;

3. la réalisation d’un nouveau découpage électoral impartial et articulé sur les standards internationaux ;

4. le financement équitable et juste de la vie politique et des campagnes électorales ;

5. la participation équitable des représentants des partis politiques légalement constitués à toutes les phases du processus électoral de l’amont à l’aval ;

6. la libre circulation de tous les acteurs politiques et le libre exercice des activités des partis politiques ;

7. l’égal accès de toutes les sensibilités politiques aux médias publics et privés ;

8. la neutralité de l’administration électorale et des éléments de la Force publique commis à la sécurisation des élections ;

9. la gestion du fichier électoral ;

10. l’élaboration urgentissime d’un chronogramme des opérations pré-électorales, électorales et post électorales de l’élection présidentielle de 2016 ;

11. l’extinction des milices privées et des polices parallèles ;

12. le rapatriement des supplétifs étrangers à l’armée congolaise ;

13. la répression de la fraude électorale, de la corruption, de l’achat des consciences et des votes ;

14. le règlement judicieux du contentieux électoral ;

15. l’implication de la communauté internationale dans le processus électoral congolais.

En plus des recommandations sur les nouvelles règles de la gouvernance électorale, le Dialogue National Alternatif a élaboré un projet de code électoral. En raison de l’importance et du volume dudit code, le Dialogue National Alternatif a décidé de la mise en place d’un comité d’experts pour son examen approfondi, en vue d’un rapport circonstancié à la Coordination des Forces politiques et Sociales opposées au changement de la Constitution du 20 janvier 2002 et œuvrant pour l’alternance démocratique en 2016.

Le Collectif des Partis de l’Opposition Congolaise rappelle que, de tous temps, les élections tripatouillées et mal organisées sont à l’origine des conflits qui déchirent le tissu social dans les pays africains. Le pouvoir en place qui, à travers les taux d’abstention enregistrés dans le processus électoral et qui voit le désintérêt des populations congolaises pour les élections qu’il organise depuis 2002, devrait réaliser que seule la bonne gouvernance électorale est en mesure de promouvoir de vraies élections. C’est la condition de la paix.

1.3. Sur la question du changement de Constitution

Le soliloque de Sibiti a abouti à une impasse qui l’a conduit à s’en remettre au président de la République qui, en fonction de ses prérogatives constitutionnelles, en réalité inexistantes dans la Constitution du 20 janvier 2002, décidera en dernier ressort.

Malgré la fanfare organisée par les partis de la majorité présidentielle en faveur de la tenue d’un référendum constitutionnel pour le changement de la Constitution, il sied de rappeler que la Constitution est la norme suprême. Elle s’impose à tous. Et, selon l’article 50 : « Tout citoyen a le devoir de se conformer à la Constitution, aux lois et règlements de la République… ». La loi fondamentale de 2002 ne donne aucune prérogative, ni au président de la République, ni au Parlement, pour convoquer un référendum sur le changement de Constitution. Plus grave, le pouvoir du PCT et ses affidés tentent de légitimer la démarche de changer de Constitution par une prétendue volonté populaire. Le pouvoir en place et ses chantres savent pertinemment, contrairement à leurs affirmations urbi et orbi, que le peuple congolais rejette en bloc ce projet funeste de changement de Constitution. Le peuple l’a exprimé en maintes circonstances, notamment à Pointe-Noire en mai dernier et à Brazzaville lors de la 10ème édition du FESPAM.

Outre le constat et l’aveu de l’impasse des conclusions de Sibiti, s’en remettre ainsi au Président qui doit décider en fonction de ses prérogatives constitutionnelles, n’est qu’une invite pour tenter de rendre digérable un parjure, doublé d’un coup d’état. Les masques sont tombés. Et comme l’a, une fois de plus, claironné le Secrétaire Général du PCT, ce jeudi 06 août 2015 sur les antennes de RFI, on veut changer la Constitution du 20 janvier 2002 pour donner un troisième mandat au président Denis Sassou-Nguesso, malgré son âge et la limitation des mandats, motif pris qu’il serait le meilleur de tous. Quel aveu pour ceux qui, des mois durant, nous ont donné à entendre qu’il ne faudrait pas personnaliser la question de changement de Constitution !

Notons tous avec affliction que le PCT voudrait conduire le pays dans un processus de monarchisation dans lequel le président de la République, les animateurs des grandes institutions constitutionnelles (Cour Suprême, Cour Constitutionnelle, Conseil Economique et Social) et des grandes administrations telles la Direction Générale du Trésor, la Direction Générale de la CRF, etc., s’éternisent dans leurs fonctions au-delà des dispositions légales en matière de gestion interne et de retraite.

Sur la question de changement de Constitution, le pouvoir est coincé. Il doit choisir entre respecter la Constitution et laisser le Congo en paix, ou passer en force, provoquer les troubles et connaître au mieux le sort de Compaoré si ce n’est pas celui des Kadhafi. Il n’y a pas d’autres issues et ceux qui l’encouragent dans cette voie, doivent dès à présent savoir qu’ils seront comptables des conséquences qui adviendront.

Par ailleurs, le recours au référendum est inopportun parce qu’il met à mal le calendrier électoral conforme à la Constitution. Le référendum est impossible aussi, car avec une gouvernance électorale calamiteuse, critiquée et rejetée par tous, sauf bien sûr si l’on veut éviter de connaître la vérité du vote populaire, il faut au préalable revoir les conditions d’organisation des élections, si on veut la sincérité du vote.

Le pouvoir même aveuglé est obligé de voir la réalité en face. L’aventure du changement de la Constitution est une tragédie inscrite dans sa démarche. Le Collectif invite le Président à se ressaisir car la quarantaine de milliers de morts de la période 1997 à 2000, au nombre desquelles les disparus du Beach de Brazzaville, sont déjà un trop lourd tribut payé par le Congo pour le pouvoir du clan Sassou.

Ainsi, mesurant la dangerosité de l’initiative du président de la République de changer de Constitution et son obsession à vouloir replonger le pays dans le chaos, le Dialogue National Alternatif, se fondant sur les dispositions de l’article 26 de la Charte des Droits et Libertés adoptée à la Conférence Nationale Souveraine et considérée comme partie intégrante de la Constitution du 20 janvier 2002, a lancé au peuple congolais un appel à la résistance à cette autre forme de dictature et d’oppression et, à la désobéissance civile en cas d’annonce du référendum par le président de la République.

Contrairement aux divagations d’une certaine feuille de chou de la place qui, dans le vain espoir de semer la peur dans le peuple, voit dans cet appel – nous citons : « un plan secret de l’Opposition pour faire mourir les Congolais », l’appel du Dialogue National Alternatif obéit à la volonté de défendre, dans la légalité et la paix, la patrie congolaise en danger. Les Congolaises et les Congolais savent bien, comme rappelé plus haut, quels sont leurs bourreaux qui passent le plus clair de leur temps à les kidnapper, les torturer, les assassiner et les faire disparaître.

Le Collectif en appelle au caractère républicain de la Force Publique congolais qui doit, en tous temps, préserver sa neutralité, assurer la paix dans le pays, la sécurité des biens et des personnes dans l’intérêt supérieur de la Nation.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Le Dialogue National Alternatif a été d’une portée politique intangible. Ses recommandations ont été destinées au président de la République par voie réglementaire. Il est une réalité telle que tous ceux qui refusent de la considérer ainsi, font inutilement preuve de cécité politique et de fuite en avant.

Le Collectif des Partis de l’Opposition Congolaise dénonce énergiquement le recours au coup d’Etat constitutionnel pour conquérir ou conserver le pouvoir.

Est-il besoin de rappeler que la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance proscrit, en son chapitre VIII, article 23, nous citons : « l’utilisation, entre autres, de moyens ci-après, pour accéder ou se maintenir au pouvoir constituent un changement anticonstitutionnel de gouvernement et est passible de sanctions appropriées de la part de l’Union » et au nombre de ces moyens précisés à l’alinéa 5 : « Tout amendement ou toute révision des constitutions ou des instruments juridiques qui portent atteinte aux principes de l’alternance démocratique » ? L’article 25 de ladite Charte stipule – nous citons : « Les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement peuvent être traduits devant la juridiction compétente de l’Union ».

Le Collectif des Partis de l’Opposition Congolaise considère que, pour l’avenir, le président de la République devrait respecter la Constitution qui justifie ses fonctions et sur laquelle il a prêté, selon l’article 69, le serment de la défendre et de la respecter. Cette disposition d’esprit le mettrait en phase avec ses prérogatives constitutionnelles réelles et lui éviterait d’imposer au pays des nouvelles souffrances inutiles après la paix chèrement recouvrée par le peuple, malheureusement ici encore, au prix de ses larmes et de son sang.

Poussé par ses partisans, le président Denis Sassou-Nguesso a choisi d’être seul, seul avec son camp, seul devant sa conscience, devant le pays et devant l‘histoire, et aussi seul responsable devant l’opinion nationale et internationale des atrocités que son obsession à demeurer à tous prix au pouvoir ferait courir au paisible peuple congolais.

Cette obsession de demeurer au pouvoir pour le pouvoir l’a conduit à délaisser la gouvernance de ce qui touche à la quotidienneté du Congolais.

2. De la gouvernance chaotique du pays

2.1. Des arrestations et autres menaces sur la paix et la tranquillité des populations congolaises

Depuis le lancement sur la place publique du débat sur le changement de la Constitution, le pouvoir ne cache plus sa réfraction au dialogue réel. Il fait de l’expression de l’opinion un délit. Toute opposition au changement de Constitution devient matière de répression et d’atteinte aux droits et libertés fondamentaux. Selon sa tactique récurrente, le pouvoir est revenu aux mesures liberticides dont les interdictions de sortie du territoire national des dirigeants de l’opposition. Tel est le cas de l’interdiction de sortie opposée depuis trois semaines aux camarades Rigobert NGOUOLALI, président de l’ARC, et Pascal TSATY MABIALA, Premier Secrétaire de l’UPADS. Peu après la clôture du Dialogue National Alternatif, le camarade René Blanchard OBA, président du MSD, venait d’essuyer le même refus de sortir du Congo. Tel est aussi le cas de la confiscation des passeports diplomatiques des anciens ministres et dirigeants de l’opposition Jean ITADI, Clément MIERASSA, Mathias DZON, Christophe MOUKOUEKE, etc.

A ces mesures qui frisent l’assignation à résidence se greffent les arrestations et les séquestrations des cadres et militants des partis de l’opposition congolaise.

Le Collectif des Partis de l’Opposition rappelle au président de la République, médiateur international dans plusieurs crises africaines, et à ses services de répression que le Congo, notre pays, ne mérite pas une telle plongée dans la dictature ! La démocratie que nous appelons de tous nos voeux ne pourrait s’accommoder de toute dictature, ni de tout système d’oppression, ni de violation de libertés et de droits fondamentaux.

2.2. Des détournements massifs des deniers publics et de la grave détérioration de la situation sociale

Au moment où le pouvoir organise carnavals, kermesses et fanfares en faveur de la tenue d’un référendum illégal pour le changement de Constitution, on ne peut ne pas faire le constat suivant : d’une part, la sortie des sommes colossales du Trésor Public et d’autre part, la grave détérioration de la situation sociale de la majorité des Congolaises et des Congolais. On l’a vu notamment à l’occasion des consultations présidentielles où le pouvoir a fabriqué, à la hâte et à coup d’espèces sonnantes et trébuchantes, des associations dites de la société civile et des partis politiques fictifs. De même, le dialogue de Sibiti aura coûté au peuple la bagatelle somme de 10 milliards de FCFA, selon les sources.

Cerise sur le gâteau, voilà le Congo, un pays producteur de bois, un pays disposant des ressources humaines qualifiées pour sa mise en valeur, un pays dont le chef de l’Etat donne à entendre tous les jours qu’il s’engage à industrialiser et à moderniser le pays, à créer des emplois particulièrement pour les jeunes, à conduire le pays à l’émergence. C’est ce Congo dont le gouvernement s’offre le caprice de commander des tables-bancs dans un pays européen avec la coquette somme de 9 milliards de FCFA.

C’est encore dans ce même pays que le gouvernement qui prétend œuvrer pour l’avenir de la jeunesse, rechigne de dégager les ressources nécessaires à l’organisation de la correction du Baccalauréat Général, à recruter des dizaines de milliers des jeunes diplômés des écoles professionnels.

C’est toujours dans notre cher et beau pays que le gouvernement assiste avec un cynisme inédit à la décadence du système de santé ainsi qu’en atteste la recrudescence de la mortalité dans les formations sanitaires où il manque de tout. C’est simplement injurieux pour le pouvoir de vouloir ainsi cacher son initiative de perpétrer son coup d’Etat constitutionnel derrière la demande ou l’initiative d’un peuple martyrisé. Mais le peuple congolais n’est pas dupe.

Le Collectif des Partis de l’Opposition, tout en invitant le peuple congolais en général, ses militants et sympathisants en particulier, à ne pas céder à la provocation, en appelle à l’implication de la Communauté Internationale dans le combat que mène le peuple congolais épris de démocratie, de justice, de liberté et de paix, pour l’édification dans son pays d’un véritable Etat de droit et d’une société véritablement démocratique.

Fait à Brazzaville, le 07 août 2015

Le Collège des Présidents