Note introductive de la Conférence de presse du 24 juillet 2015.
Mesdames et Messieurs les journalistes, chers compatriotes,
Au nom de la PLATEFORME DE LA SOCIÉTÉ CIVILE POUR LE RESPECT DE LA CONSTITUTION DU 20 JANVIER 2002, nous tenons à vous renouveler notre gratitude pour votre participation à la présente conférence de presse.
Nous nous retrouvons cette fois après le monologue qui s’est tenu du 13 au 17 juillet 2015 à Sibiti dont les conclusions n’étonnent que ceux qui se refusaient à voir le Président de la république s’éterniser au pouvoir.
Mesdames et Messieurs les journalistes, chers compatriotes,
Créée le 24 mai 2014 et ayant fait sa déclaration de sortie officielle le 26 juillet 2014, « La Plateforme de la Société civile congolaise pour le respect de la Constitution du 20 janvier 2002» est restée fondamentalement constante dans ses positions. En effet, nous voudrions brièvement rappeler les faits suivants :
- En juin 2014, nous avons adressé une lettre ouverte au Président de la République du Congo, pour lui rappeler le serment au cours duquel il a juré solennellement de respecter et de défendre la Constitution de la République.
- En juillet 2014, nous publions notre première Note de position. Elle est intitulée « Pourquoi nous disons Non ? » Elle est un argumentaire contre les tenants du changement de la Constitution. Cette Note de position se terminait, entre autres, par une alerte au peuple congolais (nous citons) : «Résister à toute initiative de changement de la Constitution du 20 janvier 2002 »
- En novembre 2014, suite à la non application par le gouvernement des conclusions des concertations de Brazzaville (2009), Ewo (2011) et Dolisie (2013), notre Plateforme en liaison avec six (6) autres mouvements et regroupements citoyens, de l’intérieur du pays comme de la Diaspora, avions adressé un mémorandum à la Communauté internationale d’accompagner notre pays dans une médiation pour la gouvernance électorale consensuelle afin d’éviter les risques d’une nouvelle guerre au Congo-Brazzaville.
- En décembre 2014, dans notre deuxième Note de position, prenant référence sur les principes de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, signée par le Congo le 18 juin 2007, particulièrement en ses articles 10 et 23, nous avons réaffirmé notre non participation à un quelconque dialogue qui n’aurait pour but que le changement de la Constitution.
Notre note introductive de ce jour comporte deux volets :
* Le premier : La mascarade de dialogue
* Le deuxième : Le devoir de désobéissance
1– LA MASCARADE DE DIALOGUE
Après avoir tergiversé, demandé qu’on le laisse se concentrer sur son mandat présidentiel en cours, après avoir divisé notre peuple pour mieux régner et se présenter en médiateur dans son propre pays, après avoir fait semblant de dialoguer avec l’opposition, notre Président a fini par tomber le masque.
Lors de notre conférence de presse du 27 mars 2015, nous vous disions ce qui suit :
« Le Parti Congolais du Travail qui avançait masqué derrière des rencontres faussement citoyennes ou de sages manipulés avait jeté le masque en annonçant sa volonté de changer la constitution lors de sa session du comité central du 31 décembre 2014. Le Président de la République, dans son discours de vœux à la nation a pris l’option de vouloir organiser un référendum sur le changement de la constitution. La synchronisation de ces deux déclarations indique désormais de façon claire que l’affirmation d’un projet initié, par petites phrases dans des interviews, par le Président de la république depuis 2007, devient la ligne officielle : PAR ET POUR L’INTÉRÊT D’UN INDIVIDU, QUI SE CROIT INDISPENSABLE, NOTRE PAYS POURRAIT CONNAITRE UN NOUVEAU CYCLE D’INSTABILITÉ CONSTITUTIONNELLE. »
Au cours de la même conférence de presse nous poursuivions ainsi qu’il suit : « Il est évident que ce qui intéresse le régime actuel ce n’est pas une révision de la constitution pour un meilleur fonctionnement des institutions publiques et de la société, c’est essentiellement pour maintenir le président Denis Sassou Nguesso au pouvoir. Pour la Majorité présidentielle, changer la constitution du 20 janvier 2002, c’est exclusivement faire sauter les articles 57 et 58, portant en substance sur la limitation du nombre de mandats. Or, l’article 185 dispose que « La forme républicaine, le caractère laïc de l’Etat, le nombre de mandats du Président de la République ainsi que les droits énoncés aux titres I et II ne peuvent faire l’objet de révision. »
II – LE DEVOIR DE DÉSOBÉISSANCE CIVILE
Les conclusions du monologue de Sibiti ne laissent donc plus aucun doute ; aussi, tel que proclamé dans le préambule de la Constitution du 20 janvier 2002 « Nous peuple congolais :…Condamnons le coup d’Etat, l’exercice tyrannique du pouvoir et l’usage de la violence politique, sous toutes ses formes, comme moyens d’accession au pouvoir ou de sa conservation. »
Et l’article 10 de la Constitution dispose : « Tout citoyen, tout agent de l’Etat, est délié du devoir d’obéissance lorsque l’ordre reçu constitue une atteinte manifeste au respect des droits humains et des libertés publiques. L’ordre d’un supérieur ou d’une quelconque autorité ne saurait, en aucun cas, être invoqué pour justifier ces pratiques ».
Foulant aux pieds l’article 69 de notre Loi fondamentale qui l’oblige, entre autres, de respecter et de défendre la Constitution, notre Président a opté de prendre le parti des défenseurs et promoteurs d’intérêts individuels, claniques et partisans. Abusant de sa position de Chef de l’Etat, il a décidé d’utiliser le pouvoir d’initiative référendaire que lui confère la Constitution pour organiser illégalement le changement de la loi fondamentale afin de se maintenir au pouvoir pour protéger des intérêts particularistes, les siens, ceux de son clan, de sa famille et de ses partisans, qui ont décidé de faire de lui un « Dieu » sans lequel le Congo ne serait que ruines et larmes.
Pour l’actuel président de la République, il n’est pas question d’abandonner le pouvoir qu’il a conquis par les armes en 1997 pour la simple raison que ce pouvoir, c’est sa chose, sa propriété, son patrimoine. Pour lui, il n’est plus question qu’un costume dénommé « Constitution » qu’il avait taillé à sa mesure ne lui imposent des contraintes qui ne lui conviennent plus. Alors que tous les travailleurs de ce pays devront à l’âge de la retraite quitter leurs fonctions, le Président Denis SASSOU NGUESSO lui, a décidé d’utiliser son pouvoir d’initiative pour reculer l’âge de sa retraite politique aux calendes grecques.
Malgré les sages conseils qui lui ont été prodigués par certains hommes d’Etat étrangers, les leaders religieux, les diplomates, ses propres amis, notre Président, au lieu de choisir de rentrer dans l’histoire en sortant la tête haute après 32 ans de magistrature suprême, a choisi de provoquer et défier tous les Congolais épris de paix, en s’accrochant au pouvoir.
Mesdames et Messieurs les journalistes, chers compatriotes,
Que n’a-t-on pas proposé au Chef de l’Etat pour qu’il accepte de pérenniser ce que notre pays n’a connu qu’une seule fois depuis son indépendance, à savoir le passage de témoin d’un président sortant à un Président élu au terme d’élections démocratiques ?
Mais le président de la République, convaincu d’être le « Messie », « les seules bonnes mains » du Congo ne veut pas renoncer. Il s’accroche désespérément à une branche qu’il ne sait pas pourrie.
Mesdames et Messieurs les journalistes, chers compatriotes
Après tant de salive et d’encre déversées sur la question du respect de la Constitution, l’heure n’est plus aux discours mais à la résistance pacifique!
La société civile par notre voix dénonce le « coup d’Etat constitutionnel » en préparation. Quelle que soit les arguties juridiques, le maintien du président SASSOU NGUESSO au pouvoir au terme de son mandat présidentiel en 2016 est inacceptable et illégitime.
Comme le proclame le préambule de notre Constitution : « Condamnons le coup d’Etat, l’exercice tyrannique du pouvoir et l’usage de la violence politique, sous toutes ses formes, comme moyens d’accession au pouvoir ou de sa conservation. »
Devant la violation de la légalité, la Constitution nous donne aussi la légalité du déliement du devoir d’obéissance : « Tout citoyen, tout agent de l’Etat, est délié du devoir d’obéissance lorsque l’ordre reçu constitue une atteinte manifeste au respect des droits humains et des libertés publiques. »
Les pouvoirs illégitimes auxquels les citoyens doivent résister par la désobéissance civile ne sont pas seulement de simples instructions administratives. Ils peuvent provenir aussi de « coups d’Etat civils » ou « constitutionnels », c’est à dire des tentatives avortées ou réussies de chefs d’Etat en place qui cherchent à rester au pouvoir au-delà des limites prescrites par la Constitution en manipulant la Loi fondamentale et en passant outre les résistances citoyennes pour parvenir à leurs fins. Ces « coups de force », au-delà des apparences de la légalité qu’ils peuvent revêtir sont aussi répréhensibles ou nuisibles que les coups d’État militaires.
Sachant que ne rien faire n’est pas une option citoyenne, nous, organisations de la société civile n’entendons pas croiser les bras face à l’attentat en préparation contre notre Loi fondamentale. Nous ne saurons, au nom d’un soi-disant « apolitisme », rester impassibles et nous rendre complices des manipulations illégitimes de nos institutions. Les OSC (organisations de la société civile) sont à la fois des vigiles et des forces de proposition pour la société.
Face à cette tentative de confiscation définitive de la souveraineté de notre peuple par le système du président Denis SASSOU NGUESSO à la légitimité finissante, nous allons résister, nous opposer à de telles velléités par des actions pacifiques. C’est pourquoi, nous appelons ici et maintenant, tous nos compatriotes, à barrer la route à la manipulation et au coup d’Etat constitutionnel en cours.
Mesdames et messieurs les journalistes, chers compatriotes,
En attendant l’évolution de la situation politique et des décisions qui seront prises par le pouvoir, nous appelons d’ores et déjà tous les citoyens à dire toujours NON au changement de la Constitution.
A tous les parlementaires patriotes, en particulier à ceux de la Majorité présidentielle qui aiment ce pays, qui aiment la vérité, démarquez-vous de l’initiative illégale du président de la République. Ne vous rendez pas complices d’un attentat contre la Constitution.
A notre Force Publique sur laquelle ce pouvoir croit s’appuyer pour prolonger illégalement sa durée de vie, l’article 171 de la Constitution dispose : « La force publique est apolitique. Elle est soumise aux lois et règlements de la République. Elle est instituée dans l’intérêt général. Nul ne doit l’utiliser à des fins personnelles.
La force publique est subordonnée à l’autorité civile. Elle n’agit que dans le cadre des lois et règlements. Les conditions de sa mise en œuvre sont fixées par la loi ».
Ainsi, face à la répression violente qui s’installe dans le pays, nous appelons la force publique à faire preuve de discernement. Rappelez-vous et n’oubliez jamais : les Congolais qu’on peut vous demander de réprimer sont vos frères, sœurs, enfants, parents et amis et non pas vos ennemis. Vous avez été recrutés et formés pour protéger le peuple et non pour tourner vos armes contre le peuple.
A tous les compatriotes congolais, nous vous demandons de vous redresser, de briser votre état de servitude et de vous apprêter à dire NON le jour où le président de la république annoncera l’organisation de son référendum anticonstitutionnel.
Mesdames et Messieurs les journalistes, chers compatriotes,
Il en va de la responsabilité morale de tous les citoyens de résister à l’application d’une mesure gouvernementale illégale. Le recours au référendum pour modifier la loi fondamentale est anticonstitutionnel. Nous n’avons pas d’autre choix que d’obliger le président de la république à retirer son funeste projet.
La Plateforme de la Société civile pour le respect de la Constitution du 20 janvier 2002 appelle au rassemblement de toutes les forces sociales et patriotiques du Congo :
Membres des associations, travailleurs, paysans, retraités, sans-emplois, préparons-nous à nous mobiliser sur toute l’étendue du territoire, de manière organisée et non violente, pour dire NON à ce référendum anticonstitutionnel en préparation !
NON AU CHANGEMENT DE LA CONSTITUTION DU 20 JANVIER 2002 !
EN AVANT POUR L’ALTERNANCE DEMOCRATIQUE EN 2016 !
VIVE LA REPUBLIQUE UNE ET INDIVISIBLE, LAÏQUE, SOCIALE ET
DEMOCRATIQUE !
A Brazzaville, le 24 juillet 2015
Pour la Coordination de la Plateforme de la société civile pour le respect de la constitution du 20 janvier 2002,
Le Porte-parole chargé de la Coordination
Dr Alex DZABANA wa IBACKA