Par Henri Blaise NZONZA
L’avènement du multipartisme en 1990 dans notre pays le Congo, avait favorisé la naissance de plusieurs partis politiques dont nombreux ont pris part à la conférence nationale souveraine qui s’est tenue à Brazzaville de février à juin 1991. Le mur de Berlin qui symbolisait encore la survie du communisme venait de tomber le 9 novembre 1989 et l’Allemagne s’était réunifiée. En Afrique, une nouvelle ère venait d’être amorcée, celle du multipartisme exigé le 20 juin 1990 à la BAULE par François MITTERAND lors du 16 ème sommet d’Etats de France et d’Afrique, sommet au cours duquel la France conditionna l’aide au développement à une transition démocratique dans la gouvernance du continent africain. Au Congo plus de cent partis politiques et associations politiques furent crées. C’était la période d’effervescence et d’émancipation politique, la parole était libérée et les journaux privés fleurissaient comme jamais .C’était la période de l’insouciance politique car tout semblait cette fois-ci être permis et l’enthousiasme était au rendez-vous.
Mais très tôt, les congolais ont commencé à déchanter et à être éclaircis, sur les motivations des uns et des autres à créer des partis politiques, lorsque les premières alliances ont commencé à se former pendant la période de transition et au sortir des premières élections présidentielles. Certains partis politiques dits de droite avaient, au deuxième tour de l’élection présidentielle du 16 août 1992, apporté leur soutien au professeur pascal LISSOUBA, président de l’UPADS, un parti de gauche. C’était le cas du RDD de l’ancien président de la République Jacques Joachin YOMBI OPANGAULT .Le président sortant Denis SASSOU NGUESSO leader d’un parti socialiste, arrivé en troisième position lors de cette élection avait tout logiquement apporté son soutien à Pascal LISSOUBA. Quant à Bernard KOLELAS, il bénéficia au deuxième tour du soutien bien que timide d’André MILONGO, un libéral connu de tous et de Jean Pierre TCHYSTERE TCHIKAYA, président du RDPS, un parti de gauche. Mais tout juste après ce deuxième tour qui avait consacré la victoire nette et logique du président Pascal LISSOUBA investi entant que président de la république le 31 août 1992, l’alliance entre le l’UPADS et son allié naturel le PCT battait de l’aile. Le PCT changea donc de camp et signa le 30 septembre 1992 un accord de gouvernement avec l’URD présidée par Bernard KOLELAS président du MCDDI, un parti libéral.
Que dire de l’Espace Républicain pour la Défense de la Démocratie et de l’Unité Nationale (ERDDUN) crée au plus fort du conflit armé qui opposait les forces du président Pascal LISSOUBA à celles du président SASSOU NGUESSO et qui consacra le 13 septembre 1997 la nomination de Bernard KOLELAS au poste de Premier ministre de Pascal LISSOUBA ? Cette alliance dénoncée à l’époque par les FDU fut aussi une véritable ratatouille politique, regroupant l’UPADS, le RDPS, le MCDDI, le RDD, l’UFD, l’UDR-MWINDA…En gros, toute la mouvance présidentielle de l’époque ajoutée à l’Union pour la République et la démocratie (URD).
D’aucuns nous dirons que c’était il y a un quart de siècle. C’était hier.
Mais tout récemment, il y a trois (3) ans, une grande partie de l’opposition congolaise avait tissé, autour de la logique du > un front commun contre le président sortant Denis SASSOU NGUESSO lors du débat sur le changement de la constitution du 20 janvier 2002 et de l’élection présidentielle du 20 mars 2016.Un casting pourtant des plus improbables si les alliances politiques se faisaient sur des bases idéologiques.
Aujourd’hui dans notre pays, le paysage politique est un véritable méli-mélo, un véritable mélange de libéraux, de leaders de la gauche, du centre qui se retrouvent dans des alliances de circonstances dépourvues de logique idéologique.
Du coté du pouvoir, le PCT, parti majoritaire qui prône la social-démocratie est allié aux partis comme le RC de Claude Alphonse SILOU, la DRD d’Hellot MATSON MAMPOUYA, le MCDDI de Landry KOLELAS et bien d’autres qui prônent eux le libéralisme. Quant au gouvernement de la république, on y trouve même Nick FILA Saint EUDES président d’un parti de droite qui se dit même de l’opposition. Au sein de l’opposition, on a l’UDH-YUKI, un parti qui prône le libéralisme et allié de l’UPADS qui prône la social-démocratie pour ne citer que ces deux partis politiques. Sur quelle base idéologique ces alliances ont-elles été rendues possibles ? Seuls ceux qui sont dans le secret connaissent la réponse. En toute logique l’UPADS devrait être l’allié naturel du PCT étant donné que ces deux partis politiques prônent la social-démocratie.
Le cas le plus inédit est l’existence même dans notre pays de trois partis politiques que sont: le MCDDI, La DRD et l’UDH-YUKI qui prônent tous le > comme idéologie mais qui travaillent chacun dans son coin et cultivent parfois une animosité sans commune mesure alors qu’ils sont tous nés des cendres du MCDDI original de Bernard KOLELAS. Ces trois partis politiques sont donc de droite mais deux parmi eux sont au pouvoir et un est à l’opposition.
Il est donc claire que dans notre pays le CONGO, les alliances se font non pas selon les affinités idéologiques, mais selon les opportunités, les personnalités, les marchandages et même selon les appartenances ethniques et régionales au grand dam des militants qui sont souvent désorientés et désabusés. Les luttes opposent des personnalités plus que des idées, des programmes, des expériences. Ces rapprochements politiques sont le plus souvent atypiques et manquent de cohérence.
Au final, tout cela rend compte de la difficulté qu’il y a à lire le paysage politique congolais riche en alliances inconscientes, contre-nature, qui se font au gré des circonstances et souvent sans fondement idéologique. Des partis qui gravitent plus autours des leaders que des idéologies. En somme, les tendances politiques sont souvent subordonnées aux affinités commandées par l’intérêt personnel plutôt que par des considérations idéologiques. De tels partis politiques s’affaiblissent, disparaissent et résistent rarement à la disparition physique de leurs leaders ou lorsque ceux-ci ne sont plus en mesure de les diriger.
La culture de ses alliances contre nature et incestueuses prouve que dans notre pays le Congo, la politique repose beaucoup plus sur des intérêts personnels des leaders politiques que sur des valeurs.
Henri Blaise NZONZA