Congo: le nouveau président chinois attendu à Brazzaville

Le nouveau Président chinois est attendu vendredi 29 mars à Brazzaville, et sur terrain, la ville fait peau neuve.

Les préparatifs vont bon train et les ouvriers sont à l’œuvre depuis deux jours pour soigner l’image de la capitale Congolaise.

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Edgar, 34 ans, travaille dans la boutique de sa mère à Makelekele, au sud de Brazzaville, le 25 mars 2013

«Les Chinois devraient recruter en priorité des Congolais». Edgar, l’un des nombreux jeunes sans emploi de Brazzaville, voudrait bien que la visite du président Xi Jinping apporte «du boulot» au Congo. Mais, trop souvent, dit-il, les sociétés chinoises arrivent avec leurs employés

«Qu’il apporte du boulot! La majorité des jeunes ici, ce sont des chômeurs», insiste le jeune homme, pendentif du révolutionnaire cubain Che Guevara au cou, dans son quartier de Makélékélé, l’un des plus peuplés de la capitale, avec ses 200.000 habitants.

«Il n’y a plus que deux compagnies qui fonctionnent: celle des militaires et celle des chauffeurs», ironise Edgar, désignant les taxis verts et blancs alignés sur l’avenue, courte et défraîchie, portant le nom de l’abbé Fulbert Youlou, devenu, en 1960, le premier président du Congo indépendant après la colonisation française.

«Nous avons du pétrole (constituant environ les 3/4 des recettes budgétaires du pays, ndlr), nous avons du bois, nous sommes entourés du fleuve… On a tout. On ne devrait pas souffrir!», enrage un fonctionnaire, pourtant proche du pouvoir, qui rappelle que le salaire moyen au Congo tourne autour de 50.000 FCFA (75 euros).

Investi mi-mars comme président de la République populaire, Xi Jinping, consacre à l’Afrique la majeure partie de sa première tournée à l’étranger. Et sa visite, vendredi au Congo, doit renforcer des relations déjà importantes entre Pékin et Brazzaville: les accords portent sur plusieurs milliards de dollars, dont le financement de plus de 500 kilomètres de route entre Brazzaville et Pointe-Noire, la capitale économique.

Mais dans le quartier de Makélékélé proche du fleuve Congo, frontière naturelle avec la République démocratique du Congo, l’annonce de cette «visite historique» ne soulève que peu d’espoirs.

«Qu’est-ce que ça va changer?», interroge un chauffeur de taxi. Mais «qu’est-ce qu’il va amener?», ronchonne une coiffeuse.

«Aucun transfert de compétences»

Rosine, 32 ans, employée dans l’hôtellerie, est l’une des rares à dire que «c’est une belle publicité».

«Cela va apporter de l’aide au Congo. Je crois que là, on aura beaucoup de travail. C’est le plus important», assure la jeune femme, fine silhouette perdue dans un jeans et un polo de l’hôtel qui l’emploie.

La Chine et l’Afrique ont considérablement renforcé leurs liens depuis une quinzaine d’années. Mais l’amertume domine chez les jeunes Brazzavillois désoeuvrés qui regrettent que les sociétés chinoises fassent venir directement de Chine leurs travailleurs, logés bien souvent à proximité des chantiers. Comme près de l’aéroport Maya Maya, où Xi Jinping doit inaugurer de nouveaux bâtiments que certains qualifient de «bijou» ou de «fierté» du Congo, voire d’Afrique centrale.

«C’est comme s’il n’y avait pas de bras au Congo. On peut +importer+ des travailleurs quand il n’y a pas de gens valides ni de spécialistes, là, d’accord. Mais les Chinois font même venir des chauffeurs! Il n’y a aucun transfert de compétences», se plaint Lewis, 46 ans, professeur dans un collège d’enseignement technique.

Autre frustration: les seuls Congolais qui sont embauchés reçoivent un très faible salaire. Et la plupart critiquent le gouvernement qui, selon eux, ne fixe pas un minimum décent pour un travail souvent harassant.

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Le nouveau chef de l’Etat chinois Xi Jinping est arrivé vendredi midi à Brazzaville, pour la première visite d’un président chinois au Congo et l’ultime étape d’une tournée en Afrique essentiellement économique, qui l’a mené en Tanzanie et en Afrique du Sud.

Le président Xi a été accueilli par son homologue congolais Denis Sassou Nguesso. Cette visite est la première d’un président chinois en République du Congo, ancienne colonie française riche en pétrole et qui compte 4 millions d’habitants.

Selon l’agence chinoise Xinhua, Xi Jinping a exprimé son envie d' »approfondir l’amitié » sino-congolaise, de « promouvoir les échanges et la coopération dans tous les secteurs ».

Dans l’après-midi, des responsables congolais et chinois ont, en présence de Denis Sassou Nguesso et Xi Jinping, conclu onze accords de plusieurs millions d’euros dans les secteurs de la coopération, l’économie, la communication, les infrastructures et de la banque. (1)

Ces accords s’ajoutent à ceux de déjà en cours, comme le financement de plus de 500 kilomètres de route entre Brazzaville et Pointe-Noire (capitale économique) et la construction de nouveaux quartiers – accords dont le coût est estimé à plusieurs milliards de dollars.

En fin d’après-midi, Xi Jinping, s’est adressé au parlement congolais.

« Nous avons la mission historique de réaliser le développement national et le bonheur de nos peuples », a-t-il dit devant l’Assemblée nationale et le Sénat réunis en congrès.

« A l’avenir le développement de la Chine sera une opportunité sans précédent pour l’Afrique; de même que le développement de l’Afrique le sera pour mon pays », a-t-il ajouté dans un discours souvent interrompu pas des applaudissements.

« Les récentes évolutions de la situation internationale nous ont non seulement apporté des opportunités de développement mais aussi posé de sérieux défis: la recherche de la paix (…) », a poursuivi Xi Jinping, qui doit inaugurer un hôpital et une bibliothèque samedi avant son retour à Pékin.

Premier partenaire commercial de l’Afrique


Revenu au pouvoir par les armes en 1997 après l’avoir assuré de 1978 à 1992, Denis Sassou Nguesso, qui aura 70 ans cette année, a été élu en 2002 et réélu en 2009 pour un deuxième septennat.

Officiellement, la France – dont l’aide a atteint plus de 24 millions d’euros en 2011 – reste le premier partenaire économique et financier du Congo: les exportations françaises ont atteint 590 millions d’euros en 2012 et la plus grande partie du pétrole est extraite par le groupe français Total.

Mais ces dernières années, la Chine, devenue première consommatrice du bois congolais, a renforcé son partenariat avec le Congo. Elle a entre autres construit un hôpital dans le sud de la capitale et étendu l’aéroport de Pointe-Noire, épicentre de l’activité pétrolière qui rapporte 5 milliards d’euros par an au pays mais où 70% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

Elle a aussi bâti le très moderne aéroport Maya Maya ainsi que le barrage d’Imboulou, à 260 kilomètres au nord de Brazzaville, le plus grand du pays.

Auparavant, en Afrique du Sud, le président chinois avait participé au sommet des grands pays émergents dits Brics – Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud – et s’était rendu en Tanzanie. Lors de ces étapes, il avait souligné son attachement aux relations sino-africaines.

La Chine est devenue depuis 2009 le premier partenaire commercial de l’Afrique. M. Xi a assuré que les relations Chine-Afrique « allaient s’intensifier » sous sa présidence et rappelé que leurs échanges commerciaux avaient déjà bondi jusqu’à atteindre 200 milliards de dollars l’an dernier.

« La Chine va continuer à étendre ses investissements et poursuivre sa coopération avec l’Afrique, conformément à son engagement de fournir 20 milliards de dollars de crédits aux pays africains entre 2013 et 2015 », avait dit M. Xi, investi mi-mars président de la République populaire de Chine.

(1)

Xi Jinping et Sassou N’Guesso, avec les parlementaires congolais

Il s’agit de deux accords de coopération économique et technique dont le premier relatif à un prêt sans intérêt de la Chine au Congo de 7.500.000.000 francs CFA et l’autre portant sur un don du même montant ; de deux accords cadres relatifs à l’octroi de deux prêts préférentiels dont l’un destiné à la réalisation de 200 logements sociaux à Mpila et l’autre consacré au projet de construction d’un complexe scolaire à Mpila, dans le cadre de la reconstruction de la zone sinistrée. Ces accords ont été signés par le ministre chinois du commerce Gao Hucheng et le ministre congolais chargé des finances, Gilbert Ondongo. Les deux parties ont également signé quatre conventions de financement portant sur la construction du barrage hydroélectrique de Liouesso, un financement de 26.305.600.127 destiné à la construction du port d’Oyo, la construction de 200 logements sociaux et du complexe scolaire de Mpila. Dans la même lancée, le Congo et la Chine ont signé un protocole d’accord pour la construction d’un port minéralier à Pointe-Noire. Le texte a été paraphé par le président de la société China road & bridge corporation, Zhang Jianchu et le ministre à la présidence chargé de l’aménagement du territoire et de la délégation générale des grands travaux Jean jacques Bouya. Une fois réalisé, ce projet de port minéralier accompagnera le développement des activités du secteur minier congolais qui attire actuellement la convoitise des investisseurs étrangers. En matière de communication, un accord a été conclu sur le renforcement de la coopération entre le ministère congolais en charge du secteur et le bureau de l’information de la République populaire de Chine. Basée à Brazzaville, la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (BDEAC) a aussi signé une convention cadre de coopération avec la Banque de développement de Chine (BDC).

Par ailleurs, en dehors de la signature de ces accords, il sied de signaler le tête-à-tête au Palais du peuple à Brazzaville, des présidents Denis Sassou N’Guesso du Congo et Xi Jinping de Chine.