Mboulou et son mentor ficèlent leur tricherie en menaçant et en excluant l’Opposition réelle
Bien installé dans son fauteuil, au Salon d’honneur de l’aéroport, sourire aux lèvres, Sassou-N’Guesso qui rentrait à Brazzaville mardi 15 décembre 2015 en provenance de Guinée Conakry déclarait : «J’aurai l’occasion de m’exprimer plus au fond sur cette question avant la fin de ce mois. En tout état de cause, la nouvelle Constitution devrait être mise en œuvre pour qu’il y ait toutes des institutions qui soient toutes en adéquation avec l’esprit et la lettre de cette nouvelle Constitution déjà promulguée». La nouvelle Constitution dont parle le président Sassou a été promulguée par lui, le 06 novembre dernier. Pour avoir organisé un référendum sur fond de crises profondes dans le pays, ayant occasionné des pertes en vies humaines, des pertes matérielles et la perte de la crédibilité du pays, Sassou-N’Guesso, comme il le voulait, a forcé le passage. En dépit des appels de l’Union africaine, de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations Unies et des Etats-Unis d’Amérique d’organiser un Dialogue sincère sur la question, le Chef de l’Etat ne l’a pas entendu de cette oreille. Conséquence : jusqu’aujourd’hui, les résultats de ce référendum n’ont jamais été salués par l’opinion internationale qui sait que la moitié des Congolais ont refusé de cautionner le coup d’Etat constitutionnel. Curieusement, c’est sur cette Constitution manquant de crédibilité que le président Sassou-N’Guesso promet de s’exprimer «ce mardi 22 décembre 2015.
Mise en œuvre de la nouvelle Constitution : une épine dans la gorge de Sassou
Il faut retenir que la mise en œuvre de cette Constitution pose problème. Car, en réalité, toute nouvelle République implique une remise à plat de tout le système politique du pays. Toutes les institutions issues de l’ancienne loi fondamentale devraient être dissoutes et remplacées par celles prévues par la nouvelle. Les conseillers en matière juridique du président, en insérant l’article 244 dans la nouvelle Constitution, ont tapé à côté sur toute la ligne : « Toutes les institutions issues de la Constitution du 20 janvier 2002 fonctionnent jusqu’à la mise en place des nouvelles institutions, sans pouvoir dépasser, pour les institutions pourvues par voie élective, l’expiration de leur mandat ». Cette disposition ne fixe pas la durée à observer entre la promulgation de la nouvelle Constitution et la mise en place des nouvelles institutions. Il suffit de ne pas dépasser l’expiration des mandats de celles pourvues par voie élective, comme le Parlement (Assemblée nationale, Sénat) et les Conseils départementaux et municipaux. Peut-on aujourd’hui former un nouveau gouvernement sans l’élection d’un nouveau président ? Le gouvernement actuel a été formé par le président de la République élu le 14 août 2009 sur la base de la Constitution du 20 janvier 2002. Il ne peut pas y avoir un nouveau Premier ministre de la République nommé par un président de l’ancienne République ! Soit, le président Sassou anticipe l’élection présidentielle avant juillet 2016– ce qui se raconte dans les salons huppés de Brazzaville – soit il attend juillet 2016 pour organiser l’élection présidentielle qui doit sonner le glas de l’expiration de son deuxième mandat gagné sur la base de la Constitution de 2002, expiration fixée au 14 août de l’année prochaine. Pire, M. Sassou ne s’adresse pas au parlement réuni en congrès, mais à l’Assemblée nationale seulement. Peut-il nous dire, sur quel texte s’appuie-t-il ? Bloqué certainement avec la nomination du Premier ministre et pour bien huiler sa machine à triche, Sassou-N’guesso aurait donné des instructions à Mboulou d’exclure l’Opposition réelle de la course, comme le justifie l’incident décrit dans le communiqué de presse de l’IDC-FROCAD.
Le diktat de Sassou à Mboulou
Le jusqu’au-boutisme et la ferme détermination de régler, coûte que coûte, les problèmes politiques du pays par la force des armes, affichés par le pouvoir depuis la tenue du référendum le 25 octobre 2015, et la promulgation, le 6 novembre dernier, de la nouvelle Constitution, persistent , malgré les appels répétés et persistants du FROCAD et de l’IDC qui exigent du régime Sassou l’organisation d’un Dialogue inclusif, avec l’assistance de la Communauté internationale, afin de préparer des élections apaisées, libres, transparentes et crédibles en 2016 et 2017. Nombreux sont les Congolais qui pensaient que la farouche volonté de M. Sassou de marcher sur des cadavres pour se maintenir au pouvoir, ainsi que le bâillonnement de l’Opposition et l’arrestation de ses cadres et militants, devaient reculer d’un cran. Grosse erreur! Car, en dépit de l’inconstitutionnalité du référendum et de la nouvelle Constitution, selon le FROCAD et l’IDC, le pouvoir campe toujours sur ses positions. La preuve, les délégués du FROCAD et de l’IDC, qui, sur invitation du ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, Raymond Zéphirin Mboulou, conformément à sa correspondance n° OOO584 MID/CAB du 7 novembre 2015, devaient prendre une part active à la séance de travail sur les questions liées à «la gouvernance électorale», ont été «accueillis» dans la salle de réunion comme des «petits malotrus». Les propos plus ou moins dérangeants, provocateurs, agressifs et insultants, prononcés par le ministre Raymond Zéphirin Mboulou, dans son mot introductif, en présence des participants à cette réunion de travail, dont ceux du FROCAD et de l’IDC, sont semblables aux slogans qui étaient à la mode après la victoire de M. Sassou en 1997, avec les Forces démocratiques unies (FDU). Il fallait être un combattant de la guerre du 5 juin pour bénéficier de quoi que ce soit. La condition était de savoir si l’on avait été au front : «Est-ce que obounda?». Aujourd’hui, les leaders des partis affiliés au FROCAD et à l’IDC, à l’identique des hommes politiques qui avaient perdu la guerre en 1997, n’ont, selon le régime Sassou, aucun droit à faire valoir. Le peuple meurtri et l’Opposition martyrisée ne doivent rien revendiquer : «Tout pour le pouvoir, rien que pour le pouvoir», comme au temps du Mono. Le Communiqué de presse du FROCAD et de l’IDC en dit long. Voici l’intégralité de ce texte rendu public le 9 décembre 2015.
Communiqué de presse de l’IDC-FROCAD
Par lettre n°000584 MID/CAB du 07 novembre 2015, Monsieur Raymond Zéphirin Mboulou, Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation, a invité les représentants de l’IDC-FROCAD à une séance de travail sur « les questions liées à la gouvernance électorale ». Arrivée à l’heure indiquée, la délégation a été surprise de constater que la réunion avait déjà commencé. Reprenant son mot introductif, le ministre a indiqué que : – La présente réunion porte sur l’examen de la synthèse des contributions des parties ayant pris part à la première rencontre du 12 novembre 2015 ; – Le Dialogue sur la gouvernance électorale a déjà eu lieu à Sibiti et l’on ne peut concevoir un nouveau dialogue à ce sujet ; – Le Congo est un pays souverain et ne peut être géré de l’extérieur ; – La délégation peut prendre le train en marche, sinon sa place n’est pas dans cette salle, car la présente réunion concerne les participants au Dialogue de Sibiti ; – La tenue de tout autre dialogue relève de la compétence des plus hautes autorités de notre pays. Réagissant aux propos du Ministre, le chef de la délégation de l’IDC-FROCAD a dit que : – La question de la gouvernance électorale ne se résume pas à la simple modification de la loi électorale en vigueur ; – Celle-ci nécessite un dialogue national inclusif, avec la participation de la Communauté internationale ; – Un dialogue national alternatif s’est tenu à Brazzaville après celui de Sibiti, et les conclusions ont été adressées aux plus hautes autorités du pays ; – Des lettres ont été adressées à Monsieur le Président de la République et au Ministre de l’Intérieur et de la Décentralisation pour souligner la nécessité de l’organisation et de la tenue d’un tel dialogue, afin de préparer les élections apaisées, libres, transparentes et crédibles en 2016 et en 2017. En considération de ce qui précède, la délégation de l’Opposition s’est vue dans l’obligation de se retirer de la salle. Au regard de l’importance que les plateformes FROCAD-IDC accordent à la tenue des élections libres, démocratiques, fiables, équitables, crédibles dans un climat politique apaisé, en vue de l’alternance démocratique en 2016, l’Opposition réelle s’engage à tout mettre en œuvre pour apporter sa contribution à l’amélioration de la gouvernance électorale.
Fait à Brazzaville, le 9 décembre 2015.
Par : Ghys Fortuné Dombe-Mbemba