Électricité : le barrage de Moukoukoulou menacé de fermeture

Mise en service en décembre 1979, la centrale hydroélectrique de Moukoukoulou, fruit de la coopération sino-congolaise, court le risque d’un arrêt total de son fonctionnement en raison de sa vétusté due au manque de révision régulière des turboalternateurs.

Avec quatre groupes turboalternateurs produisant chacun 18,5 MW, soit une puissance installée de 74 MW, ce barrage, qui alimente les départements du Pool, de la Bouenza, du Niari et du Kouilou, se trouve, selon les techniciens, à l’agonie : « Il manque des pièces de rechange au niveau de la centrale. Au moment où nous parlons, il y a trois vannes de vidange des aspirateurs bloquées pour lesquelles il faut nécessairement une révision », explique Pierre Boungou-Niekélé, chef de la section mécanique générale.

La situation devenant plus que préoccupante, une mission de techniciens de la Société nationale d’électricité (SNE), conduite par le directeur de la production et du transport d’énergie, Albert Bakala, a confirmé la triste réalité : « Le cri d’alarme lancé depuis quelques années par les exploitants du barrage de Moukoukoulou semble ne pas trouver de réponse des décideurs afin de démarrer sa révision totale recommandée par les différentes études auxquelles ce barrage a été soumis, a relevé Albert Bakala. Il arrivera un moment où nous ne pourrons plus démarrer les groupes. »

L’arrêt du barrage de Moukoukoulou plongera une grande partie du Congo dans une précarité énergétique dont les conséquences se feront sentir au niveau socioéconomique, notamment auprès d’industries telles que Saris Congo ou la cimenterie de Loutété, qui dépendent de ce barrage. Car Moukoukoulou constitue une des charnières essentielles du boulevard énergétique du Congo.

En effet, pendant que les administratifs et les politiques tergiversent entre l’analyse des études, la validation des textes et les procédures de passation des marchés, les machines poursuivent, quant à elles, leur processus de détérioration et de corrosion. Pour tenter de sauver cet outil et continuer sa production, la SNE a amorcé le dragage de la rivière Moukoukoulou, une première fois depuis la mise en service du barrage. « C’est la première opération depuis une trentaine d’années. C’est une satisfaction pour nous qui devons garantir la sécurité du barrage en évitant que le sable n’entre dans les canaux et ne réduise ainsi le volume d’eau nécessaire devant garantir la régulation des groupes », a précisé le directeur de la production et du transport.

Après 34 ans de fonctionnement, Moukoukoulou n’a connu que trois révisions générales, alors que l’intervalle recommandé est de quatre ans. Inutile de dire qu’une révision s’impose d’urgence.

Guy-Gervais Kitina

Par les Dépêches de Brazzaville/Adiac.com

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Reportage

Révision générale de la centrale hydroélectrique de Moukoukoulou

Pour des raisons techniques et financières, les travaux traînent encore

Par Pierre IKAMBA, Directeur de la Distribution, Production et Transport SNE

Démarrés le 10 octobre 2003 pour une durée de 18 mois, les travaux de la révision générale de la centrale hydroélectrique de Moukoukoulou confiées à la Société Nationale Economique et Technique de Zhengwi de Chine pour un coût de 4 milliards F.CFA n’ont, à ce jour, pas encore abouti.

Fruit de la coopération sino-congolaise, cette centrale et le réseau à haute tension entre la Bouenza et le Niari, mis en service en 1979 a été conçu avec la prescription du constructeur de faire une révision générale quinquennale des équipements pour garantir la pérennité du système. La dernière révision d’avant guerre ayant eu lieu en 1988, il était impératif après les troubles socio-politiques qui ont secoué notre pays, de mettre en œuvre des opérations de révision générale afin d’éviter l’arrêt total de la production de la centrale qui se trouvait déjà dans un état très alarmant.

En effet, onze ans après la dernière révision, les machines de la centrale et les principaux équipements électromécaniques du réseau présentaient déjà de graves signes de fatigue. C’est ainsi qu’aux termes du contrat de révision générale signé le 9 avril 2002, la partie congolaise devait prendre en charge l’ensemble des dépenses locales d’installation et de fonctionnement du chantier comprenant entre autres, la réhabilitation de la route d’accès Mouyondzi-Moukoukoulou, de la cité ouvrière de Moukoukoulou et des habitations de la mission chinoise à Bouansa, des ateliers mécaniques, laboratoires et magasins de la centrale, l’acquisition des moyens roulants de chantier, l’adduction d’eau potable dans la localité de Louboto et au site d’habitation de la mission chinoise à Bouansa.

L’ensemble de ces dépenses évaluées à près de deux milliards F.CFA n’ayant pas été vite honoré par la partie congolaise, le chantier qui devait commencer en novembre 2002 a été retardé jusqu’à l’arrivée de la mission chinoise sur le site en août 2003. Finalement, les travaux n’ont officiellement démarré qu’en octobre 2003.

Pour les garantir, le Congo a débloqué la somme d’1 milliard cinq cent millions F.Cfa. Confiés à la société Zhengwi, filiale congolaise de WIETC, ces travaux ont été réalisés à hauteur de 70 %. Il ne reste plus que l’adduction d’eau potable dans la localité de Louboto, la réhabilitation des ateliers nécessaires à l’usinage des pièces et l’étanchéité des maisons.

État d’avancement des travaux de révision générale

Démarrés donc le 10 octobre 2003, ces travaux traînent encore pour des raisons technique et financière. La partie chinoise avance comme raisons, l’insuffisance des fonds pour faire face à l’ensemble des besoins qui dépasseraient les prévisions du cahier de charge en raison de la dégradation prononcée de la centrale. Avec les fonds qui leur avaient été alloués, elle estime qu’il est impossible de combler les besoins en pièces de rechange. La partie congolaise évoque quant à elle les difficultés de l’entreprise WIETC pour mener à bien ces travaux qui sont pour elle la première expérience en révision générale d’un complexe industriel. Ces contradictions persistantes ont entraîné les blocages au niveau du chantier. Ce qui fait que jusqu’à présent sur les trois turbines démontées, seuls deux ont été révisés c’est-à-dire la turbine n° 3 qui a été mise en service le 8 août 2005 et la turbine n° 4, au début du mois de mai 2006. Quant à la turbine n° 2, en raison de graves anomalies de fabrication, elle nécessite qu’elle soit totalement remplacée par une neuve. Au niveau des postes, aucun n’est entièrement révisé. Leur réhabilitation est tributaire de la signature de l’avenant consécutif à l’examen du dossier des études supplémentaires réalisées par un bureau d’études chinois dénommé Chang Jiang Institute of Survery, Planning Design and Research.

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En 2007, le barrage et son usine ont pourtant été réhabilités par la Chine comme en témoigne cet article provenant du site de la DGGT

La relance du barrage de Moukoukoulou

Les sociétés chinoises Zhenwei et Weitc ont entrepris deux ans durant la révision de quatre groupes (alternateur + turbine) de 18,5 MW chacun ; la révision des transformateurs de puissance de 45 MVA, la réhabilitation du système contrôle-commande et de supervision de la centrale; l’installation de quatre nouveaux régulateurs de vitesse et l’installation de quatre nouvelles armoires pour le système d’excitation. Fort de tous ces travaux, le barrage de Moukoukoulou a aujourd’hui une puissance de 75 MW.