LA POLITIQUE BUDGETAIRE « prudente » : un oxymore à la congolaise ?
Par VERLIN RICHARD (VR Au Carré)
Verlin Richard BEKA BEKA
Le Gouvernement congolais parle de politique budgétaire « prudente ». Ce concept, récemment employé au Congo, vise-t-il à décrire une prise de conscience de l’exécutif ?
Pour n’être pas systématique, son emploi est récent au Congo. En effet, dans la pratique, et par convention, la notion de gestion, renvoie invariablement à celle de prudence.C’est en tous cas ainsi que les gestionnaires la conçoivent.
Cependant, l’adjonction du qualificatif «prudente » cherche évidemment à caractériser une prise de conscience. Tout ceci revient, on le devine, à désigner une volonté politique ferme de sortir le Congo dans l’abîme dans lequel, il se trouve.
Plusieurs remarques s’imposent alors:
Si une gestion prudente existe, il faudrait logiquement, par symétrie, parler de « gestion imprudente » ayant conduit à un endettement excessif, alors que le pays avait engrangé des excédents budgétaires quelques années auparavant.
Mais, probablement par trop pléonastique, l’expression n’est que récemment employée, par le gouvernement congolais.
Dans cette hypothèse-là, il aurait été convenable qu’on parle simplement « de principe de prudence », sans affecter la variable du qualificatif de « prudente ».Le gouvernement aurait eu raison car toute gestion repose sur le principe de prudence puisqu’elle consiste à administrer, à encadrer, à veiller au bon déroulement des processus de gestion préalablement fixés.
Dès lors, l’interaction ainsi instituée entre le substantif « gestion » et l’épithète « prudente » est incorrecte, car elle revient à signifier que, en matière de gestion, les principes qui régissent ses processus, ne comptent pas, seule la prudence compte.
Il faut alors, au-delà du paradoxe sémantique, se demander ce que révèle l’émergence d’une telle locution au plan des représentations mentales qui la fondent. Serait-ce l’idée qu’elle participe de la mise en œuvre d’un langage ritualisé et hypnotique qui, se déploie dans un déni quasi psychotique des aspects déplaisants de la réalité ?
Il est vrai qu’il existe chez l’homme politique congolais, une appréhension supplémentaire à l’égard de certains mots porteurs de diagnostics potentiellement autodestructeurs. L’emploi du terme « mauvaise gestion », par un ministre, pourrait renforcer l’ampleur du phénomène de l’incompétence, de l’échec, car on sait le poids des mots en politique. Alors, on évoque une tendance du discours contemporain, qui consiste à créer des oxymores, dont on peut dire qu’il s’agit du principal mode d’innovation linguistique en cette période de crise économique et financière.
Ce nouveau langage dont la prodigieuse efflorescence ne laisse pas d’étonner chaque jour davantage, le congolais, que je suis : « nouvelle espérance », « chemin d’avenir », « marche vers le développement ».
Ce procédé puise sa source dans la nécessité, pour le régime politique qui domine la vie politique du Congo, de refouler les contradictions afin de pousser toujours plus loin ses potentialités de donner à croire, qu’il est le seul infatigablement, capable de gérer le pays.
Que les choses soient bien claires, il ne s’agit pas de critiquer la notion de gestion prudente du gouvernement.
Il s’agit d’essayer de comprendre pourquoi le discours qui structure notre représentation du « réel » peine à concevoir que le développement économique du Congo se fera uniquement par la bonne gouvernance.
Affirmons alors à tout le moins que si, comme le postulait le psychiatre Carl Gustav Jung, dans l’inconscient collectif des congolais, la mauvaise gouvernance figurera certainement en bonne place dans son inventaire.
Il apparaît donc, en cette période inflationniste, qu’il est plus nécessaire que jamais de s’interroger, au minimum, sur la gestion des finances publiques, sur les dépenses publiques, que le gouvernement décide d’engager dans un budget, en interrogeant, le sens et les effets positifs sur la croissance.
Globalement, tant qu’on ne fera pas de bonnes politiques publiques, il n’y aura pas de bonnes finances.
Tant qu’on n’interrogera pas, de manière différenciée, ce que nous voulons voir croître ou décroitre, en recettes publiques et en dépenses publiques, et la manière dont nous souhaitons que le gouvernement le fasse, nous éluderons les conséquences parfois néfastes de ce processus de gestion « prudente ».
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