Par : Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA
L’année 2018 sera l’année contre l’oubli. L’oubli de nos martyrs, de nos compagnons de lutte injustement emprisonnés, l’oubli de la privation de nos libertés fondamentales et de notre démocratie naissante assassinée.
Aucun peuple ne peut se réjouir de voir ses enfants privés de liberté pendant que d’autres festoient. Toutes nos pensées à nos amis incarcérés pour avoir défendu la liberté dans la lignée de Mandela. Nous n’oublions pas non plus ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts tant le désespoir à pris le pas sur l’espoir que nous sommes censés incarner pour tous. En tout état de cause, je vous prie de trouver pour vos familles et vous-mêmes mes vœux d’une année 2018 pleine d’espoir.
Au début de cette année 2018, nous allons assister encore une fois de plus impuissants à la crucifixion de nos vaillants leaders, car ainsi en a décidé le despote d’Edou. Toute opposition démocratique au Congo-Brazzaville est suspecte de la présomption de culpabilité d’atteinte à la sureté de l’état. Que les descendants de Jean-Pierre Thystère-Tchicaya et Bernard Kolélas s’en souviennent dès à présent qu’ils sont des alliés de circonstance pour asservir le peuple congolais. Alors que dans un état démocratique c’est le Parquet qui convoque les justiciables, au Congo-Brazzaville c’est Sassou qui se confond à la justice. A quoi bon avoir créé une nouvelle république si les usages restent les mêmes ? L’insincérité de cet homme qui s’est déjà lavé les mains devant tous les Congolais refait surface.
Après 34 ans d’exercice de pouvoir, l’on aurait pu s’attendre à ce que l’homme devienne sage, mais comme tout dictateur il se raidit hanté par les nombreuses atrocités commises durant son règne macabre. Qu’il n’oublie pas que les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles et que ses amis d’aujourd’hui seront ses juges de demain car ils refuseront de s’assimiler à lui.
Cette année 2018 débute mal pour nous. L’on aurait pu s’attendre à ce que Sassou nous remette sa démission, mais il n’en n’est rien. Il durcit son régime et continue sa fuite en avant comme d’habitude. Paulin Makaya continue de purger une peine de prison à perpétuité alors qu’il devrait être libre depuis le premier décembre 2017.
Une année horrible (Annus horribilis) 2017 vient de s’écouler. Le Congo-Brazzaville ne doit pas devenir comme le Soudan du Sud géré par des seigneurs de guerre qui prennent en otage leur pays.
Tout ce qui concoure à la paix au Congo-Brazzaville est une bonne initiative tant notre peuple souffre depuis trop longtemps du nombrilisme de ceux qui se sont militairement accaparés le pays.
Depuis un certain temps, un accord de paix aux contours flous, balancé tel un os aux chiens, tient en haleine les commentateurs de la vie politique congolaise. Comme toujours ce régime dictatorial se distingue par ses propres contradictions à chaque fois qu’il se sent acculé. Ce ne serait ni la première ni la dernière car certaines habitudes ont la dent dure.
Dans l’état actuel des choses, les démocrates congolais ne peuvent laisser que la paix sur toute l’étendue du territoire ne se négocie entre les deux belligérants armés.
L’opposition congolaise est multiforme ce qui en fait sa force et sa faiblesse dans le même temps. N’oublions pas qu’il y’a eu dès le début de ce processus de refus de la dictature des figures qui se sont distinguées et qui ont fait qu’il y ait eu cette magie qui à un moment nous a tous fait rêver. Mokoko, Bowao, Okombi-Sallisan et d’autres bien que ressortissants de la partie Nord du pays ont empêché Sassou d’ethniciser le débat sur le respect de la constitution, seule garante de l’unité nationale. Claudine Munari bien que partenaire au gouvernement a prôné le respect des institutions et du serment prononcé devant le peuple qui doit demeurer intacte quelles qu’en soient les circonstances. Le Pasteur Ntumi a servi de rempart contre la barbarie qui n’a jamais cessé de s’abattre jusqu’à ce jour sur les populations paisibles du Pool.
L’horizon a du mal à s’éclaircir dans notre pays depuis toujours tenu en otage par ceux qui ont fait le métier des armes, pas pour protéger les peuple contre l’envahisseur, mais pour mieux l’avilir. C’est cette tâche qu’il conviendrait d’extirper le moment venu afin de retrouver une armée républicaine.
La correction à la marge des accords de paix récemment signés ne peuvent pas qu’engager le seul Pasteur Ntumi qui n’est pas à lui tout seul l’opposition congolaise. Il est temps que notre opposition prenne ses responsabilités si elle ne veut pas être prise entre deux feux dévastateurs. La force des armes ne peut en aucun cas tuer notre débat démocratique qui n’a qu’un seul but dans notre pays : le respect de la constitution, la bonne gouvernance et l’alternance démocratique. Ainsi, les membres de l’opposition devant discuter des modalités de sortie de crise ne devront pas uniquement être désignés par le seul Pasteur Ntumi mais en concertation avec toute l’opposition congolaise. Le Congo-Brazzaville doit cesser d’être un champ de bataille perpétuel dans lequel la prime est accordée aux guerriers. Le temps est au compromis et non à la compromission.
Sassou, qui n’est ni l’alpha ni l’oméga de la politique congolaise, a échoué. Nous en sommes tous conscients. Le malheur du peuple congolais c’est Sassou qui ne comprend pas que dans l’intérêt supérieur de la nation, il est temps qu’il quitte les affaires s’il lui reste un peu de dignité.
Je ne désespère pas que notre pays puisse retrouver le camp des nations civilisées et démocratiques. Notre tâche ne sera pas facile mais il nous revient de rendre possible l’impossible.
Contrairement à ce que pense Guy-Brice Parfait Kolélas, la résolution de la crise congolaise doit être globale tenant compte des points essentiels déjà évoqués à savoir :
- La libération de tous les prisonniers politiques,
- La restauration des libertés fondamentales,
- L’arrêt des hostilités dans le Pool et,
- Le dialogue politique inclusif.
Notre seule préoccupation est le bien être de tout le peuple congolais. Jusqu’à preuve du contraire la Balkanisation ou la Somalisation du Congo n’est pas à l’ordre du jour à moins que ce ne soit un dessein caché pour certains apprentis sorciers.
Pour l’intérêt de notre pays, l’opposition congolaise doit rester unie et ne parler que d’une seule voix. L’erreur est humaine mais persister dans l’erreur c’est diabolique.
C’est David Augustin de Brueys qui écrivait : « On ne consulte pas toujours ceux qui pourraient nous donner de bons avis, parce qu’on cherche plutôt à avoir des complices de ses sentiments, qu’à s’éclaircir et à sortir de ses égarements. » Il est temps de prendre de la hauteur pour ne pas toujours être les acteurs des occasions manquées, ce qui nous fera perdre notre crédibilité vis à vis de notre peuple.
Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA