Après cinquante ans d’indépendance, La majorité des Congolais vivent encore dans des quartiers insalubres, des ruelles poussiéreuses ou pleines de boue, des nids-de-poule, les toits en tôle rouillée. Ces phénomènes d’habitats indignes, insalubres et informels concerneraient environ 2/3 de la population du Congo.
Ces citoyens habitent souvent des logements qui ne répondent pas aux conditions minimales de confort et de dignité, dans des zones de pollution et d’insécurité dépourvues des aménagements primaires pour l’alimentation en eau potable, la collecte et l’assainissement des eaux usées.
Malgré l’embellie financière tant vantée par le gouvernement actuel, plusieurs quartiers, des villes entières n’ont guère changé depuis les années 1960. Cette situation s’est encore empirée sous les 26 ans du règne de M. Denis Sassou Nguesso. Le renouvellement urbain ou la lutte contre l’habitat insalubre ne sont pas une priorité pour Sassou Nguesso. Le gouvernement actuel ne cesse de se lancer dans des projets très secondaires rejetant aux oubliettes la recommandation datant de 2009 d’Amnesty International qui est un plaidoyer pour l’accès aux services sociaux de base, en Afrique sub-saharienne: droit à des logements salubres, à l’éducation ou encore à la santé et à l’environnement.
Il est difficile de faire du sensationnel au Congo-Brazzaville tant ce pays est étouffé par la médiocrité, la corruption et le copinage. Un pays producteur de pétrole qui est incapable de soigner sa population et d’aménager les logements sociaux de façon durable. Un pays producteur de bois incapable de fabriquer des bancs et des tables pour ses écoliers. Un pays qui ne manque pas d’esprits brillants mais qui est obligé de subir le lavage de cerveau d’une presse officielle dirigée par les sbires. Pourtant une classe bien aisée composée d’un clan qui s’accapare de tout multiplie les scènes de mépris, d’injustice sociale avec de l’argent usurpé au peuple. Ce peuple qui a faim, qui a soif. Ce peuple qui s’enfonce toujours plus dans la précarité. Pour le sortir du gouffre auquel on veut le maintenir contre son gré, il n’existe qu’une seule solution: redonner sa dignité humaine à chaque congolais en lui assurant le minimum vital dont il a besoin pour vivre.
La galère des Congolais
Le spectacle qu’offrent les Congolais vivant dans des baraques de fortune, des bidonvilles, côtoyant les immondices et autres détritus dans nos villes est une honte devant tant d’opulence étalée chaque jour par nos politiques. L’incapacité de raser par exemple, un quartier de Poto-Poto, allant de la rue Paul Kamba à l’avenue de France à Brazzaville, est l’expression de cette politique du non renouvellement urbain. Une politique basée sur l’attitude traditionnelle consistant à attendre la catastrophe avant de réagir. Les mesures préventives qui permettent de sauver des vies humaines sont tout simplement ignorées.
Au Congo, l’achat d’un appartement ou d’une parcelle ne sont pas subventionnés. Comme c’est le cas depuis près d’une décennie au Maroc, en Côte d’Ivoire et plus près de chez nous en Angola. Le gouvernement congolais s’obstine à ne pas mettre en place un fonds de garantie pour les revenus modestes et irréguliers. L’implantation au Congo d’une banque Congolaise de l’habitat n’a pas favorisé l’essor de modernisation des quartiers et villages. Les banques rechignent à accorder des crédits aux Congolais des bidonvilles. Pourtant les membres du clan au pouvoir accumulent tous les ans des prêts pour des réalisations strictement fallacieuses. D’autres s’offrent des biens de l’Etat avec de l’argent de l’Etat. On s’octroi des hôtels, des terrains, des voitures de luxes, etc… avec des prêts injustifiés et surtout égoïstes. Le bourbier dans lequel s’enlise le Congo actuellement résulte ni plus ni moins d’un manque d’éthique flagrant de la part de ses dirigeants. Quand on possède un sens éthique, on ne laisse pas les citoyens manquer du minimum vital. Pour qu’un être humain s’épanouisse, il doit d’abord se sentir digne, et la dignité passe par le respect de l’autre. Ce gouvernement respecte t-il ses citoyens ?
Les bidonvilles ne sont pas que l’apanage des pauvres. Aujourd’hui des enseignants, des fonctionnaires, des militaires, des policiers y vivent. Faute d’avoir pu trouver un meilleur logement, même s’ils ont un revenu moins modeste que celui de leurs voisins de fortune… Certains ont recours à des mécanismes d’épargne informelle, empruntant à leur patron ou à des proches.
L’intervention des organismes privés reste limitée, et, sur le terrain, les problèmes s’accumulent. Faute d’un plan d’urbanisme planifié et moderne, les congolais s’entassent dans les bidonvilles ou s’installent anarchiquement à la périphérie des villes. A ces lieux, il n’y a ni assainissement, adduction d’eau, de l’électricité, de l’aménagement des voies qui desservent les logements, les transports, les équipements collectifs, l’aménagement des espaces, etc.
Brazzaville et Pointe-Noire sont caractérisés par la promiscuité et l’insalubrité de l’habitat dans la plupart des quartiers qui connaissent des problèmes d’accès à l’eau potable, de protection contre les risques naturels ou provoqués (érosions, inondations, etc.), de contrôle et de traitement des eaux usées, de collecte et d’évacuation des ordures. Cette dégradation de l’environnement est liée à une absence de politique d’urbanisation, à une forte croissance démographique due au croît naturel et à l’immigration, ainsi qu’au nombre croissant des ménages vivant dans l’extrême pauvreté.
En effet, il n’existe pas réellement de politique de logement à Brazzaville et à Pointe-Noire, le plan d’aménagement de l’espace ne laisse pas apparaître une architecture cohérente avec le lotissement des zones habitées, les styles architecturaux sont disparates, on croise au milieu des quartiers insalubres de belles villas modernes et des habitations précaires. La dégradation de l’environnement urbain par l’érosion hydrique prend une dimension dramatique qui trouve ses origines dans l’interaction entre l’occupation anarchique de l’espace, l’insuffisance des infrastructures, comme les canalisations, dans les zones d’occupation ancienne et leur absence dans les zones d’occupation récente, la fragilité du milieu naturel, etc.
La voirie n’assure plus l’évacuation des ordures ménagères et, a fortiori, ne contrôle plus les décharges et elle est inexistante dans certaines villes. En saison des pluies, ces zones d’épandage se transforment en véritables cloaques dont les émanations pestilentielles nuisent grandement au confort et à la santé de la population. La gestion des déchets solides se fait selon des circuits de ramassage non déterminés et peu fréquents, ainsi que par des déversements non contrôlés le long des voies publiques, des ruisseaux, etc. Les établissements administratifs et commerciaux produisent surtout des déchets sous forme de papiers très souvent brûlés sur place. Pour la consommation de l’énergie, bien que doté d’énormes potentialités en ressources (pétrole, gaz, bois et hydroélectricité), Brazzaville et Pointe-Noire connaissent actuellement une grave crise du secteur énergétique. Un des graves problèmes auxquels sont confrontés Brazzaville et Pointe-Noire est l’utilisation du bois-énergie pour satisfaire la demande des ménages.
Prêts garantis par le gouvernement
A la périphérie des villes, le nouveau lotissement manque cruellement d’équipements et de lieux de vie. Pas d’écoles. Pas de commerces. Le marché, autrefois au cœur du bidonville, est à présent à plus de 10 minutes en taxi… C’est un souci majeur, on ne crée pas des villes, on crée du logement. On ne prend pas non plus en compte les problèmes des habitants des bidonvilles. Certains sont relogés très loin de leur lieu de travail et perdent leur emploi. L’inadéquation entre le rythme d’installation à la périphérie des villes et celui du transfert des habitants favorise la spéculation foncière, la corruption qui sont autant de freins aux opérations de renouvellement urbain. Reste enfin la question de l’accompagnement social qui est inexistant. On assiste simplement à un déplacement des problèmes d’un quartier à un autre, d’un bidonville à un autre : absence d’eau potable et d’électricité. Les dépôts d’ordures à l’air libre. Ces tas d’immondices qui se multiplient au coin des rues, sont nocifs pour la santé des citoyens et source de pollution.
Cette situation inadmissible prouve l’existence d’un réel problème d’assainissement. Quelques rares particuliers veulent réagir et s’adonnent au ramassage de ces ordures, mais le font avec un matériel malheureusement rudimentaire qui laisse à désirer. À dire vrai, ils utilisent des engins non motorisés s’apparentant à des brouettes communément appelées « pousses-pousses ». Et ce sont ces mêmes pousses-pousses qui servent à la fois au ramassage des ordures et au transport des pains…
A cette pratique des dépôts d’ordures à l’air libre, s’ajoute le manque de curage des caniveaux. En outre, quand les pluies s’abattent sur la ville, on constate que les eaux entraînent les tas d’ordures vers les habitations. En effet, les quartiers manquent cruellement de canalisations. Et du coup, ces ordures trempées dans les eaux de pluie entraînent des épidémies.
À Brazzaville et Pointe-Noire, la population vit dans un environnement insalubre et cela n’inquiète pas le gouvernement de Sassou Nguesso et les responsables municipaux qui ne définissent pas des stratégies d’assainissement. A Pointe-Noire, les vieilles maisons branlantes des quartiers historiques de la capitale économique montrent aussi l’insalubrité d’une partie de l’habitat. A Dolisie, les quartiers Maganzi et Mouyondzi sont dans une insalubrité avancée. Toutes les grandes villes du Congo renferment des poches d’habitations insalubres.
En 2011, le déficit national en matière de logements est grandiloquent. Exaspérés, les Congolais vivent de plus en plus difficilement la situation. Face à la pression populaire, Sassou Nguesso et son gouvernement tentent de résoudre le problème à pas de tortue. Ainsi, quelques logements ont été construits à Bacongo et à Kintélé. Mais les prix de vente de ces logements sont hors de portée d’un fonctionnaire moyen. Actuellement, quelques logements sont en construction à Mpila et au Camp 15 août. Il n’y a pas de mesures incitatives destinées aux Congolais pour acquérir ces logements. De même, il est à déplorer la cadence de production de logements sociaux actuels qui ne pourrait pas résorber les bidonvilles.
Compte tenu du faible risque commercial des projets et pour permettre à toutes les couches sociales d’en bénéficier, le gouvernement doit mettre en place un dispositif étatique qui garantit les prêts des populations modestes à hauteur de 70 à 80%. Ce dispositif permettrait aux congolais non bancarisés de bénéficier du dispositif pour se loger dans des conditions décentes. Le Gouvernement doit exiger des maires de mettre en place des pôles départementaux de lutte contre l’habitat indigne et l’institution de plans communaux de lutte contre l’habitat indigne. Il faut aussi que le gouvernement prenne des mesures de défiscalisation qui, contribuant à un accroissement de l’offre de logements sociaux neufs, est à notre sens la plus efficace dans la lutte contre l’insalubrité.
Chris ABELA, www.dac-presse.com