Mon Père ce Héros ! Monsieur l’ambassadeur dit « Ambassa » (1ème partie)

alphonsine-mikouiza-215x300-9100853 Alphonsine MIKOUIZA

Par :  Alphonsine MIKOUIZA

1 ere  PARTIE 

Il existe plusieurs histoires à raconter sur mon Père, je retiens celle-ci car elle montre cet engagement qui circule dans mes veines et qui me pousse à lutter contre l’injustice.

Mon Père ce Héros, faisait partie d’un groupe de jeunes très dynamiques, des citadins de Brazzaville fraichement débarqués à Nkayi pour aller faire tourner les machines de production à l’époque de la SIAN, de HUILKA, de la CIDOLOU. Mon père était affecté à la SIAN qui regroupait l’usine de fabrication du sucre  de l’huile et de la farine.  Pour vous situer, c’est ce groupe qui est devenu après la nationalisation et scission la SIACONGO, la SUCO et la MAB  etc .

Avant son accident lors de la maintenance d’un broyeur à blé et maïs, c’est lui qui faisait tourner toutes les grosses machines qui broyaient la canne à sucre  pour la fabrication du sucre et le maïs et le blé pour la farine, l’arachide pour l’huile. A l’époque ils étaient considérés comme des ingénieurs car mon père faisait également le montage des pièces et la maintenance de ces différentes machines qui à l’époque sans lui rien ne pouvaient tourner et causer un chômage technique qui parfois arrivait pour manque de pièces de rechange au Congo. A l’époque, il n’ y a avait pas  de congolais qui savaient les faire tourner  et les réparer en cas de panne, il fallait faire venir un technicien depuis la France  pour les mettre en marche ou faire la maintenance. Mon père ayant suivant sa formation dans un centre de formation à Kinshasa qu’on appelait « Le Hangar américain », a été formé par les Américains qui avaient ouvert ce centre à Kinshasa.

Donc je disais, mon père fraichement débarqué de Brazzaville arrive à Jacob quatrième ville du Congo Brazzaville, aujourd’hui Nkayi, il a été embauché par la SIAN avec les recommandations du gouvernement  de LiSSOUBA sous la présidence de MASSAMBA DEBAT. C’est le ministre de l’agriculture de l’époque , Augustin KOMBO, frère ainé de Mgr E. KOMBO qui était chargé de chercher les jeunes  talons compétents pour remplacer les blancs à certains postes. Nous sortons de la colonisation et le Congo manque de compétences.

Mon père commence son travail dans ce grand groupe la SIAN qui faisait vivre toute la population de Jacob et alentours. Il a fait embaucher plusieurs personnes de cette ville à venir travailler car il manquait la main d’œuvre pour couper la canne à sucre et charger les broyeurs. Il fallait parfois mener des campagnes dans les villages pour trouver des travailleurs pour les usines.

Comment il est devenu Monsieur l’ambassadeur dit « AMBASSA »

Un jour il était dans son bureau, il a entendu des cris et des pleurs de certains ouvriers de l’usine, il est sorti de son bureau et constate amèrement que le blanc, un français à l’époque qui était le chef d’équipe de ces ouvriers, les avait alignés et était entrain de les fouetter avec une chicotte parce qu’ils ne voulaient pas se mettre au travail suite à un retard de paiement de salaire. C’est ce français chef d’équipe qui s’occupait du paiement de leur salaire, il ne l’avait pas fait, les ouvriers réclamaient juste leur dû.

Alors mon père constatant cela, le mauvais traitement de ces ouvriers, il est venu arraché la chicotte des mains de ce français et a menacé de fouetter ce chef d’équipe avec. Toute l’usine était en ébullition, tout le monde était sorti, parce que mon père très jeune à l’époque à peine une vingtaine, s’est mis à les défendre contre ce chef d’équipe qui les maltraitait depuis longtemps. C’est à ce moment-là que toute la foule s’est mise à crier « Vive monsieur l’ambassadeur ! Vive monsieur l’ambassadeur ! Pour ces ouvriers, la plupart analphabètes, ils pensaient qu’un ambassadeur c’est celui qui les représente et défend leurs intérêts, les droits des salariés. Nous savons qu’il s’agit en réalité d’un syndicaliste. C’est à partir de ce jour-là que mon Père avait reçu son titre de noblesse…

Cette histoire avait créé un tel bruit qu’il est arrivé au bureau du ministre de l’agriculture de l’époque Monsieur Augustin KOMBO, car le chef d’équipe et le PDG de l’entreprise demandaient le licenciement de mon père, demande qui avait reçu une fin de non-recevoir.

C’est de là qu’est parti le surnom de mon père qui était connu dans toute la ville de NKAYI dans la région de la BOUENZA comme Monsieur l’Ambassadeur dit « Monsieur AMBASSA ». Pour venir chez nous, dès votre arrivée à la gare, il suffisait de demander à n’importe qui de vous emmener chez monsieur l’ambassadeur et tout le monde se bousculait pour vous y emmener et pourtant c’était à l’autre bout de la ville.

Oui c’était mon père ce Héros qui n’avait jamais arrêté de défendre les opprimés et de lutter contre l’injustice dans ce grand groupe agroalimentaire.

Dans son quartier également, il était très impliqué à corriger certaines injustices, là c’est une autre histoire : il était devenu chef de quartier, chargé de régler certains litiges entre voisins.

Quant à ma mère c’est aussi une autre histoire de femme courageuse et engagée qui a sauvé la vie à plusieurs autres femmes des villes et villages alentours de Nkayi en les aidant à mettre au monde leur bébé et à en prendre soin dans des endroits où il n’y avait aucun centre médical.

A suivre !!!

Alphonsine Mikouiza.