Aerco (Aéroports du Congo) ! On devrait encore parler de ce monstre créé de toutes pièces dans une officine d’arrière-cour, pour enrichir illicitement, au nom d’un semblant de supervision ou de contrôle aéroportuaire, un petit nombre de citoyens, au détriment de l’intérêt du plus grand nombre d’habitants d’un pays, surtout lorsqu’il s’agit non seulement d’un domaine aussi stratégiques que les aéroports internationaux, mais aussi de plusieurs milliards de FCFA qui se volatilisent, au vu et su de tout le monde.

Les Français, par exemple, ont refusé que les Chinois prennent le contrôle de l’aéroport de Toulouse, qui n’est pourtant pas aussi rentable que les aéroports internationaux de Brazzaville, Pointe-Noire et Ollombo. Mais Jean-Jacques Bouya, ministre de l’Aménagement du territoire et des grands travaux, et Jean-Louis Osso, Conseiller aux Transports du Chef de l’Etat, ont réussi à faire signer en 2011 auprès de M. Sassou un Contrat de concession bidon (monté par le cabinet COEM), entre l’Etat congolais et la société Aerco.

Après la signature de ce contrat léonin, qui fait des responsables congolais des « zobas » ou « miyibis » (entendez : « dupes » ou « voleurs »), l’on croyait que la Direction d’Aerco et ses amis mafieux marcheraient, prudemment et lentement, dans la gestion des aéroports. Grosse erreur !

D’emblée, ils ont augmenté la redevance aéroportuaire internationale de 13.000 à 23.000 FCFA, pour permettre, soi-disant, à Aerco d’investir. Huit mois seulement après, l’on ne sait par quel miracle, des soi-disant intermédiaires et conseils ont été rémunérés à hauteur de 558 millions 544.000 FCFA ! Au douzième mois, Jean-Jacques Bouya a fait passer les indemnités d’un quart de journée de session de Conseil d’administration de 26 millions 923.078 à 66 millions 666.667 FCFA pour sept personnes, sans compter les frais de billets d’avion en première classe, les frais d’hôtels et autres charges. Le plus grand scandale a été celui de voir le monstre Aerco (qui n’a rien investi, rien apporté, même pas une aiguille au Congo) amortir, à son compte, des actifs évalués en 2011 à 149 milliards 549.899.164 CFA.

En 2011, Aerco a, en effet, reçu un acompte de 5 milliards 849.535.466 FCFA pour amortir ses bâtiments-fictifs ! Mais, quels bâtiments Aerco avait-il construit en 2011 au Congo ? Jean-Louis Osso, Jean-Jacques Bouya et Gilbert Ondongo (ancien ministre des Finances et actuel ministre de l’Economie), peuvent-ils dire à l’opinion comment une entreprise (qui n’a rien investi, même pas dans la fabrication d’une aiguille), peut-elle amortir des actifs fictifs ? Le commun des mortels a-t-il tort de dire aujourd’hui que le cabinet KMPG, les ministres Gilbert Ondongo et Jean-Jacques Bouya sont pris la main dans le sac, et qu’ils devraient être interpellés ? De même, le groupe français Egis Airport Operations et autres devraient aussi être interpellés.

Face à cette gestion scabreuse, n’est-il pas judicieux de suivre l’exemple du Mali, de la Côte-d’Ivoire, de la Guinée et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest, qui ont résilié plusieurs contrats de concession aéroportuaires ?

Le Mali, la Côte-d’Ivoire, la Guinée … révisent les contrats de concession mafieux. Mais, le Congo, à l’ère de la nouvelle République sous Sassou-N’Guesso …

En effet, dans un passé récent en Afrique de l’Ouest, suite à de nombreuses irrégularités, plusieurs gouvernements ont décidé d’annuler des contrats de concession. Le gouvernement ivoirien par exemple, par deux décrets pris en Conseil des ministres le 4 février 2015, avait décidé d’annuler l’attribution à la société Aera, filiale du groupe français EGIS Airport Operations, la construction de la ville aéroportuaire « Aérocité », à la Place Akwaba (Abidjan). Raison principale évoquée : la défaillance de la société EGIS, qui n’a pu réaliser ce projet dans les délais et les conditions de tarif convenus. Ce projet, d’un coût global de 127 milliards de FCFA, comprend un complexe multipolaire, des infrastructures commerciales, des centres de loisirs, des zones résidentielles, l’extension, la gestion et l’entretien de l’aéroport…

Bien que la société EGIS Airport, à travers sa filiale Aera, assure l’exploitation de l’aéroport Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan depuis 1996, cela n’a pas empêché le gouvernement de lui retirer la concession de cette ville aéroportuaire de 3700 hectares. Aussitôt après, le gouvernement ivoirien, qui se soucie du bien-être et de l’avenir harmonieux de son peuple, et qui refuse de se faire rouler dans la farine, a lancé un Appel d’offre international.

La Guinée a retiré à GETMA la concession du port de Conakry. Le gouvernement malien a annulé une dizaine de contrats de concession minière… De même, d’autres gouvernements plus regardants sur les pratiques occultes d’EGIS Airport Operations (qui ne veut rien investir) n’hésitent pas de lui fermer la porte au nez. Le cas du Sénégal, où ce groupe français a perdu l’Appel d’offre sur le contrat de concession de l’aéroport de Dakar, devant les entreprises turques SUMMA et LIMAK. Dans les ruelles dakaroises, plus d’une personne interrogée suspectaient cette entreprise française de verser dans des pratiques louches et peu recommandables. Les entreprises turques, par contre, ont investi dans la construction du nouvel aéroport de Dakar et dans la nouvelle compagnie aérienne nationale Air Sénégal. Face à ces excellentes prestations, l’Etat du Sénégal a dit son satisfecit à l’égard des entreprises turques auxquelles il a jeté son dévolu.

En guise de rappel, l’Etat du Sénégal a 34% de parts dans la nouvelle société aéroportuaire, avec la garantie de recevoir 20% du total des revenus ! Pourtant, ce sont les entreprises turques qui ont investi. Malheureusement, le Congo, qui a investi plus de 300 milliards dans ses aéroports internationaux de Brazzaville, Pointe-Noire et Ollombo, n’a que 15% !!! Et ceux qui n’ont rien investi récoltent 85% des parts du gâteau.

En définitive, il est temps d’arrêter le pillage des ressources aéroportuaires au détriment du peuple congolais. Cette concession à Aerco ne semble poursuivre d’autres objectifs que l’enrichissement personnel. Il faudrait donc avoir le courage de relancer un Appel d’offre sérieux, qui permettrait au Congo et aux Congolais d’avoir un contrat de concession digne de ce nom, et dont ils n’auraient pas à avoir honte. De plus, il serait souhaitable de relever de leurs fonctions tous les mafieux, Congolais et « Mindélés » (« Expatriés »), qui ont versé dans cette magouille. Notre consœur Jeune Afrique conviendra avec nous pour dire que le Congo ne sera pas le premier pays à décider ainsi. Le peuple et Dieu voudraient s’aviser si MM. Denis Sassou-N’Guesso, Clément Mouamba, Gilbert Mokoki… bref ! Si tous les dirigeants de la nouvelle République sont en adéquation avec le mot d’ordre RUPTURE qu’ils prônent à longueur de journée.

En attendant d’y revenir dans nos prochaines éditions, nous publions, ci-dessous, certains documents qui élucident nos propos.

Ghys Fortuné DOMBE BEMBA

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Les preuves:

aerco200003-4017292